Fait divers
Quand un rafleur se fait voler
Nous sommes un soir dans une brigade de gendarmerie, en périphérie de la ville de Cotonou. Ce sera un soir comme tous les autres, sauf que celui-ci a permis à des gendarmes d’effectuer des contrôles inopinés de pièces d’identité, dans leur parcours entre les ruelles de plusieurs petits quartiers très populeux. Plusieurs minutes après, c’est une moisson de plus dizaine de personnes, hommes et femmes mélangés, que le pick-up déverse dans la cour de la brigade. Très tôt, les formalités d’identification de ces fautifs d’un soir et, déshabillement et mise au violon des hommes pour toute la nuit. Quant aux femmes, vu leur statut favorisé par leur sexe, elles sont envoyées dans une salle comportant quelques bureaux et y sont consignés, pour un traitement que leurs amis masculins peuvent considérer comme un véritable luxe. Au creux d’un confort dont l’importance est maîtrisée par les quelque filles de l’aventure, vu le traitement infligé à leurs compagnons masculins d’infortune, l’un d’elle demande à aller uriner, ce qui lui est permis par l’un des musclés gendarmes, quelque peu exténué de l’aventure de rafle et soucieux de se taper un petit somme. Espérant que la fille se situerait facilement dans l’espace inconnu, il lui permet de sortir du bureau et du hall pour se retrouver dehors et lui retourne à ses affaires de sommeil. Mais, très tôt, celle-ci, forte de son nouveau privilège après celui du bureau comme violon, elle laisse le gendarme se retirer dans son sommeil, fait l’état des lieux où elle se trouve et découvre non loin du gendarme désormais ronflant, un portable tout neuf à la charge. Faisant semblant de retourner sur ses pas, elle se baisse, tend le bras, se saisit lestement de l’appareil qui brille de mille feux et disparaît, pour se retrouver vraiment dehors, non plus pour uriner, mais pour faire un nouvel état du dehors, et pour découvrir des murs à portée de ses jambes. Rapidement, elle se lance dans une escalade de l’obstacle en ciment et disparaît dans la nuit, plus que jamais libre, humant l’air. A l’intérieur, personne ne se doute de la fuite de l’absente quand plusieurs minutes plus tard surgit le gendarme au visage particulièrement crevassé qui, orphelin d’un portable acheté en début de semaine et disparu à son réveil provoqué par l’entrée bruyante d’une autre équipe de rafleurs. Il se rue vers les locatrices de circonstance, assises sur un banc, demande des nouvelles de la permissionnaire que celles-ci déclarent n’avoir plus vue après sa sortie pour aller uriner. Rage, furie du gendarme, course vers le dehors, parcours en quelques secondes de la cour encombrée d’engins et de voitures, pour revenir conclure, avec ses collègues, devant les prisonnières de luxe, à l’évasion de la fille. Rage nouvelle et ruée vers le dehors en pick-up avec ses collègues pour retrouver la fuyarde. A leur retour, rage des rages, elle est plus que jamais absente, disparue avec un joli trophée de téléphone portable double sim: comment des gendarmes ont pu se laisser avoir dans leur propre fief et, par une femme ?
Man Minard
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