L’électorat des jeunes
L’une des clés qui déterminera l’issue du double scrutin prévu pour mars 2011 au Bénin, se trouve au niveau des jeunes. Sur les 8 millions d’habitants que compte le pays, plus de la moitié a moins de 30 ans. C’est dans cette optique que tous les blocs politiques en compétition pour cette course électorale de longue haleine, s’évertuent à la chouchouter par tous les moyens. Du côté de la mouvance présidentielle, il y a, notamment, les jeunes turcs de la République et les jeunes patriotes. Du côté de l’Union fait la nation (Un), c’est également la même dynamique. Preuve en est du meeting politique, dénommé « Camp des jeunes ambassadeurs », organisé le week-end dernier sur la plage de Cotonou. Alors, au-delà de ces manifestations grand public, il est une fois encore posé la question de la vision qu’ont les hommes politiques béninois pour la jeunesse du pays. Les discours de circonstance sont des strapontins qui ne trompent plus grand monde. Le fait de mettre des personnalités prétendues jeunes à des postes dits de responsabilités, est une carte qui n’a plus les attributs d’un bon joker. Dans un pays où les lendemains se révèlent plus incertains qu’avant, les hommes politiques s’érigent, tous autant qu’ils sont, en défenseurs de la jeunesse. Et, pour la circonstance, ces jeunes qui sont mis en avant pour vilipender le camp d’en face ne sont juste que des marionnettes. Au mieux, si l’objectif politique qui est celui de la victoire est atteint, le jeune en question est nommé quelque part, en guise de récompense. Au pire pour lui, ceux qui lui faisaient naguère une cour assidue auront tôt fait de le ranger aux placards de l’histoire. Aujourd’hui, le nombre de jeunes diplômés grossit de jour en jour, et ceux qui n’ont pas le piston parental pour un emploi se retrouvent sur le carreau. L’école béninoise fabrique, depuis des décennies, des apprenants moulus dans un système éducatif complètement carbonisé et qui a besoin qu’on lui donne un second souffle. Mais, malgré cela, à la fin de chaque année scolaire, c’est la même rengaine des résultats aux différents examens et des soutenances pour tel ou tel autre diplôme de l’enseignement supérieur. On va droit dans le mur, mais personne ne prend vraiment conscience du danger qui guette et qui est déjà à nos portes. A cela viennent se gangréner ces jeunes, apprentis sorciers de la paresse, qui ont trouvé dans l’arnaque sur internet, un débouché pour se faire de l’argent et se donner un statut social de lugubre nom. Un renversement des valeurs qui a touché le fond dans nos centres d’instruction, ces arnaqueurs n’hésitant pas à narguer leurs professeurs, en prétendant être capables de leur payer le salaire qu’ils gagneront durant toute une année. Ces voyous du net œuvrent impunément chaque jour dans les cybercafés de la ville de Cotonou. Et, même les autres grandes agglomérations du pays en sont touchées. Alors, dans une société en manque de repères, c’est la boîte de Pandore qui est ouverte à toutes les dérives, sans que personne ne puisse lever le petit doigt pour dire stop. Ceux qui nous dirigent sont loin de la vertu et ne donnent pas l’exemple qu’il faut. Ils se chamaillent, juste pour des intérêts politiques en monnaie sonnante et trébuchante, pendant que la majorité du peuple croupit dans une misère sans fin. La société béninoise ne fabrique plus beaucoup de modèles auxquels elle peut valablement s’identifier. Ou ces modèles en question se sont fait distancer par ces mauvais exemples qui proposent une vision de l’instantané sans se soucier nullement de l’avenir. L’heure est grave et, la perspective des prochaines échéances est une formidable opportunité pour mettre sur la table toutes les questions qui demandent plus que jamais une solution concrète qui soit solide et digne du nom. Mais, avec ce qui se passe depuis que la campagne électorale précoce a commencé, tous les hommes politiques sont déjà à côté de la plaque. Un autre acte manqué de plus.
(Chronique parue dans le Journal Le Mutateur, paraissant à Cotonou)
Bernado Houenoussi
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