dimanche 9 octobre 2016

Pour le Ministre Lucien Kokou, à propos de l’exonération de la scolarité des filles « […] le second cycle n’a pas été pris en compte, pour 2016, et cela ne le sera pas aussi pour 2017 … »

Dans le cadre de la rentrée scolaire 2016-2017


Mesure phare de la première rentrée scolaire effectuée par le régime du Nouveau départ : les élèves filles du second cycle des établissements publics du Bénin ne bénéficient plus, dès la rentrée scolaire 2016-2017, de l’exonération des frais de scolarité. L’une des informations fortes relevant de l’interview qu’a bien voulu accorder à notre Rédaction, Lucien Kokou, Ministre des Enseignements secondaire, technique et de la formation professionnelle. En outre seront mises en œuvre plusieurs autres mesures de réorganisation par le Gouvernement du secteur éducatif. 

Lucien Kokou
Le Mutateur : Bonjour à vous, M. Lucien Kokou. Vous êtes le Ministre des Enseignements secondaire et technique, et de la formation professionnelle. Merci d’avoir accepté de nous accorder cette interview, en cette veille de la rentrée scolaire 2016-2017. Il nous semble qu’en dehors de la proclamation des vrais résultats du Brevet d’études du premier cycle (Bepc), pour l’année scolaire écoulée, vous ayez aussi à votre actif d’autres actes profondément réformateurs de l’enseignement secondaire et technique au Bénin. Combien sont ces nouvelles réformes et quelles sont-elles ?


Le Ministre Lucien Kokou : Merci, M. le Journaliste. En réalité, il n’est pas réellement question de réformes, mais on est en train de repartir aux éléments basiques dans un système éducatif. Pour dire vrai, l’approche que nous avons constatée, en application, manque d’une véritable politique de manuels. Donc, il faut mener une vraie politique de manuels, en suivant une procédure très simple que des groupes ont déjà expérimentée, des groupes spécialisés, à l’Inspection pédagogique. Je pense que nous sommes dans ce schéma-là.
Ensuite, il y a une évaluation, en bonne et due forme, de l’Approche par compétences, au 1er cycle du secondaire. Donc, de la 6ème en 3ème, nous avons choisi 6 à 7 matières qui doivent nous permettre de la réussir. Et, à partir de cette évaluation, nous allons trouver les éléments vraiment nécessaires pour envisager des mesures correctives, celles-ci qui doivent se baser sur un travail scientifique. Ces données pourront permettre d’opérer ces retouches que tout le monde réclame. En Français, par exemple, tout le monde réclame le retour à la dictée. Mais, la dictée seule ne suffit pas, aujourd’hui, pour résoudre toute la problématique dans cette discipline ; il faut avoir une base de données claires, ce qui aboutira à cet état des lieux et aidera à trouver les mesures correctives nécessaires et utiles.
Il faut dire aussi que la nomination des membres du corps administratif dans les écoles, les collèges et les lycées s’est fondée, pour une fois, sur la liste d’aptitude ; donc, cette année, nous avons vraiment tenu compte du grade qui fait, par exemple, qu’un directeur ne soit pas moins élevé que son censeur. Donc, on est revenus à ces éléments fondamentaux de la hiérarchie et des grades, notamment. C’est un peu dans ce contexte que le thème de la Journée pédagogique, à l’enseignement général, qui s’est tenue le 29 septembre dernier, est intitulé : « Le respect de la hiérarchie dans l’enseignement secondaire général en République du Bénin : état des lieux et perspectives ».
En dehors de cela, nous avons aussi fermé quelques lycées techniques, 8 précisément et, la raison en est que, qui dit lycée technique, dit un gros investissement. L’état des lieux a montré qu’aucun des lycées concernés ne compte 100 apprenants. Or, cela fait partie des normes qui existent ; il en est ainsi dans le but d’amoindrir les coûts unitaires de formations. Certains de ces lycées créés depuis 3 ans, comme celui de Tchaourou, n’ont pas atteint cet effectif. Il est à noter que, si à l’ouverture d’un lycée technique, on n’atteint pas l’effectif de 100 apprenants, on considère que, soit les spécialités du lycée créé ne correspondent pas à la demande des populations en matière de formations, soit le lycée créé ne tient pas compte des potentialités économiques et sociales, ce qui laisse croire que son importance n’est pas perçue par les populations pour que celles-ci y envoient leurs enfants en formation. En dehors de Tchaourou qui a un site avec des limites connues, tous les autres lycées ne disposaient pas d’un site viabilisé, au moment de la prise de décision. Et, il faut ajouter pour Tchaourou, par exemple, que pour la soixantaine des élèves, il faut mobiliser des professeurs vacataires qui quittent Ina, à N’Dali, à près de 100 kilomètres, pour aller donner leurs cours, le proviseur en étant le seul agent, en bonne et due forme. Donc, du point de vue viabilité, il y a problème. Du point de vue même du bâtiment qui a été construit, on ne l’avait pas encore réceptionné ; ayant été sur le site, j’ai constaté qu’il était déjà croulant.
Il est vrai que les lycées techniques et la formation professionnelle restent les domaines de prédilection du Gouvernement, mais il faut rationnaliser un peu les choses, de manière que, d’ici 2 ans, que l’Etat continue d’investir sur ces sites pour que les gens reviennent dans ces lycées. En réalité, par le passé, on s’est contentés d’y aller faire des cours théoriques.
A Dassa et à Savè, les professeurs quittaient souvent Bohicon. Avec cette distance, un accident est vite arrivé, quand on est sur la voie. Donc, il s’agit pour nous de protéger les professeurs et de travailler à ce que les apprenants ne viennent plus seulement prendre des cours théoriques. On s’est dit qu’il valait mieux arrêter et les envoyer dans les lycées disposant de tout ce qu’il faut, en matière d’équipements, afin qu’ils bénéficient d’une formation professionnelle et technique, en bonne et due forme. En effet, pour les lycées techniques, il s’agit d’améliorer l’employabilité des jeunes, ce qui fait que les cours théoriques ne sont pas suffisants et qu’il faut aller à la pratique qui suppose des équipements. Or, selon le point qu’on m’a fait, la dernière fois, le coût brut d’un lycée est estimé à 1 milliard 200 millions de Francs Cfa, pour qu’il soit immédiatement fonctionnel. L’Etat va engager des dépenses puisque nous voulons former une masse critique d’ouvriers spécialisés, d’ingénieurs, ce qui signifie qu’il faut prendre toutes les dispositions pour que nos apprenants, à l’issue de leur formation, puissent être compétitifs sur le marché du travail. Voilà les raisons qui fondent ces fermetures-là.
Un autre élément d’innovation pour cette rentrée : les chefs d’établissement seront dotés d’une lettre de mission, qui est déjà conçue ; on va leur dire ce qu’on attend d’eux et, ils vont être présents dans des classes pour effectuer au moins 6 heures de cours, parce que le directeur d’un collège ou le proviseur d’un lycée est le premier responsable pédagogique. A ce titre, il faut qu’il mette la main à la craie. Donc, les membres de l’administration auront des classes ; cela aussi relève du fait qu’en tenant compte des grades, entre autres, les meilleurs professeurs sont les directeurs, aujourd’hui. Donc, on ne va pas perdre cette main-d’œuvre qualifiée-là.
En outre, pour accompagner vraiment les préfets de Département, le Gouvernement a décidé que les secteurs de la santé et de l’éducation soient présents directement avec ces Préfets. Donc, il faut 12 Directeurs départementaux que j’ai pu nommer, à l’issue du Conseil des Ministres du mercredi 28 septembre. Ceux-là aussi auront un cahier de charges bien précis. Et, en ce qui concerne le secteur de l’éducation, c’est le Conseil national de l’éducation qui va être installé qui est habilité à recruter les Directeurs départementaux, à travers un appel à candidatures et une étude de dossiers. Ainsi, ceux que j’ai nommés le sont de manière vraiment transitoire, et tout est fin prêt pour installer le Conseil national de l’éducation.
Aussi, cette année, nous avons pu mobiliser, au niveau du Ministère des Finances, un genre d’avance pour les subventions concernant l’exonération de la contribution scolaire des filles du 1er cycle, parce qu’il n’y en a pas pour le 2nd cycle ; aucun texte ne l’indique, jusque-là. Dès la rentrée, le Ministère des Finances procèdera au paiement, sous forme d’avance, selon un certain pourcentage du total à payer, en attendant le vote du budget. En effet, ce qui faisait la difficulté, c’est que l’année scolaire est à cheval sur deux années budgétaires, le vote du Budget général de l’Etat n’intervenant qu’en décembre, alors qu’il faut toujours attendre avril ou mai pour mettre en exécution ce budget. Donc, cette année, le Gouvernement a décidé d’anticiper en octroyant une avance tout en ajustant, dès décembre, avec le nombre effectif des élèves filles du 1er cycle, dans les établissements scolaires. Nous avons un progrès, à ce niveau.
Par ailleurs, pour le Budget 2017, on est en train de prévoir une petite enveloppe d’environ 150 millions pour les établissements privés, qui ont des filles aussi ! Ce sont aussi des enfants béninois qui vont dans ces écoles qui réalisent de bonnes performances. Grâce à ces écoles, le pourcentage de réussite s’améliore un peu. Alors, il est question de justice, ce qui impose de commencer à faire quelque chose, en attendant que le Conseil national de l’éducation puisse se prononce sur le cadre d’aide qu’il faut apporter aux établissements privés. Un effort financier est donc prévu pour soutenir les écoles privées. Pour que cet objectif soit atteint, quelques critères sont déjà disponibles : par exemple, au moins 50% de réussite au Bac, avec au moins 50 inscrits … Donc, même si c’est 1 million qu’on donne à un établissement privé, c’est déjà quelque chose pour que ces établissements aient de quoi mener des investissements. Ce n’est qu’un début.
Au niveau des enseignants, j’ai eu le départ massif à la retraite d’un contingent d’enseignants bien formés : la dernière promotion de l’Ecole normale supérieure, recrutée en 1986. Alors, urgemment, on doit recruter dans l’ordre de 3000 enseignants ; le Ministère de la Fonction publique et le mien en sont déjà dans la procédure. Aussi, quelques enseignants qui sont dans les bureaux ont été déplacés vers les classes et, les Inspecteurs déployés dans les Inspections pédagogiques départementales (Ipd) vont encadrer la vacation qui reste une source de gaspillage de ressources ; imaginez-vous que, rien que pour 2015, la vacation a coûté 16 milliards à l’Etat, pour quel résultat ? Or, avec ce montant important, on aurait pu recruter des contractuels, au moins ! Ce qui est gênant, c’est qu’on a effectué des contrôles, au moment où j’exerçais comme Inspecteur, des contrôles ayant permis de détecter que des gens trichaient, ne faisant pas le cours et émargeant, vu qu’ils étaient directement payés par le Trésor public ; imaginez un professeur de sport qui prend 5 classes en même temps, pendant 2 heures de temps, et qu’il émarge dans 5 cahiers de textes. Cela fait 10 heures ! De ces anomalies, il y en a plein sur le terrain. Il faut pouvoir encadrer la vacation, cette année, pour que nos ressources qui deviennent de plus en plus rares, soient mieux gérées.
Nous avons aussi réinstauré le livret scolaire qui va être informatisé bientôt ; un logiciel nous permettra d’inscrire et d’identifier chaque apprenant qui aura un identifiant unique, ce qui aidera à le suivre dès la 6ème. Pourquoi nous devons faire ça ? Nous n’avons pas une politique d’orientation de nos élèves. Alors, avec les dirigeants de l’Unesco, j’ai pu avoir un entretien ; ils veulent utiliser leur pôle de Dakar pour former quelques spécialistes en orientation. Si nous prenons en compte les élèves de 6ème, cette année, c’est pour pouvoir les suivre dans les acquis de leurs compétences, dans les différentes disciplines, de manière qu’à leur arrivée en 3ème, nous ayons des éléments d’appréciation pour mieux les orienter, parce que nos enfants ont des atouts, des potentialités que nous n’arrivons pas à vite découvrir pour mieux les orienter. Nous voulons renverser une tendance, pour les 4 ou 5 ans qui viennent, celle de cet effectif élevé de l’enseignement général ; nous voulons retourner cela à la formation professionnelle et à l’enseignement technique. Cela veut dire que nous voulons avoir des lycées techniques performants, avec des équipements modernes, pour que nos élèves de la 3ème puissent être orientés dans ces filières, pour devenir des ingénieurs de travaux, des ouvriers spécialisés dans les domaines pointus de la technologie, de manière à ce que nous entrions dans cette universalité de l’informatisation, notamment, et que nos apprenants aient ces atouts pour se rendre utiles. Donc, pour l’orientation, nous allons envoyer en formation quelques cadres dans le pôle de l’Unesco de Dakar et, il semble qu’en 18 mois, cela peut se faire. Donc, ils vont revenir pour que nos établissements commencent à orienter les apprenants.
Deuxièmement, nous voulons donner un statut aux collèges. Un collège, c’est de la 6ème en 3ème et, l’enseignement fondamental, suivant la Loi sur l’orientation de 2003, c’est du Ci en 3ème, ce qui fait 10 ans. Il faut alors donner un vrai statut aux collèges pour qu’on ait des lycées, sachant qu’un lycée va de la seconde en terminale. Cette identification fait partie du programme que nous devons exécuter ; nous voulons retourner à ces normes-là, à ces règles basiques, pour que ce que nous avons comme collèges où les effectifs sont écrasants, qu’on puisse les désengorger en créant des collèges à part et des lycées à part. Le faire signifie que nous aurons des lycées scientifiques où l’objectif est d’avoir un lycée scientifique par Département, pour que des filières comme la série C, qui disparaissent, qu’on puisse les réhabiliter. Dans ces lycées, il y aura des enseignants qualifiés en Mathématiques, en Svt, en Spct, entre autres, des professeurs qualifiés pour encadrer réellement les apprenants en sciences. On ne va plus disperser nos énergies, avec, à tous les kilomètres, un collège qui dispose d’une seconde C ou d’un terminale C, avec 10 élèves. Un kilomètre plus loin, on a un collège qui a 8 élèves, pour la même série. Il faut regrouper ce genre d’apprenants pour arriver à un effectif raisonnable, pour qu’on puisse envoyer des professeurs de Mathématiques dans ces centres-là, pour donner cette formation à nos apprenants. Donc, il y a quand même quelques efforts que nous devons faire.
Et, à l’endroit des enseignants, du corps professoral, les Statuts particuliers vont être revus, ceux-ci que le Gouvernement veut loger dans l’ensemble global de la revue de la Loi 086, qui organise la Fonction publique ; il a fait cette option parce qu’il veut mettre les corps à statuts particuliers dans un ensemble qui va être voté par l’Assemblée nationale. Mais, en attendant, l’indice de 1,25 point est reconnu et est donné aux enseignants, les reversés sont en train d’être reclassés. Petit à petit, ces problèmes vont trouver solution. Progressivement, nous allons essayer de retrouver la ligne d’un système éducatif, en bonne et due forme. Voilà donc quelques grands chantiers qui sont ouverts, au niveau du Ministère des Enseignements secondaire et technique, et de la formation professionnelle, et que nous devons conduire.



M. le Ministre, à travers votre intervention, faut-il comprendre que la gratuité de la scolarité au niveau des filles du second cycle des établissements publics ne sera pas effective pour cette nouvelle rentrée scolaire ?  

En fait, nous, nous ne parlons pas de gratuité, mais d’exonération des frais de scolarité au niveau des jeunes filles. Pour le second cycle, si vous vous en souvenez, c’était une annonce qui avait été lancée, à la veille de la compagne présidentielle. Donc, le budget de l’année 2016 était déjà bouclé. Cela a pénalisé beaucoup d’établissements qui ont cru en cette idée. Mais, quand nous avons fait le point financier de cette mesure et que nous l’avons envoyé au Ministère des Finances, tout le temps, on nous a rétorqués qu’aucun texte ne soutenait la chose. Donc, je dis à tous les directeurs des Ceg (Collège d’enseignement général, Ndlr) que le second cycle n’a pas été pris en compte, pour 2016, et que cela ne le sera pas aussi pour 2017, parce que les textes que nous avons aujourd’hui parlent de la 6ème en 3ème ; c’était un thème de campagne, que les gens ont utilisé, aucun texte ne supportait la chose. Nous, nous ne pouvons pas nous engager là-dessus.



Vous avez aussi pris un Arrêté concernant les heures de vacation vers les collèges privés, effectuées par les membres du corps administratif des établissements publics …

Tout directeur, s’il doit travailler, c’est chez lui, c’est dans son établissement qu’il prend des heures ; la lettre de mission le spécifie clairement. Il n’est pas question qu’il aille faire de la vacation ailleurs, parce que nous voulons des directeurs présents. Dites-vous qu’il y a une erreur que nous commettons dans le pays : le directeur d’un collège est le premier responsable pédagogique, comme je l’ai dit tantôt, et il a l’obligation de suivre tout ce qui se passe dans toutes les disciplines, au sein du collège. Je suppose qu’il enseigne l’Anglais ; cela ne l’empêche pas d’aller suivre un cours de Mathématiques. Pour cela, il se fait accompagner de l’Animateur d’établissement (Ae), dans cette matière. Quand il va dans la salle de classe, c’est la démarche méthodologique qu’il regarde, mais les notions académiques, l’Ae est là pour lui dire ce qui se passe. Donc, nos directeurs doivent avoir ce réflexe-là ; étant les premiers inspecteurs, cela leur permet de suivre tout de près, c’est de cette façon qu’ils n’auront plus le temps d’aller ailleurs. Les directeurs doivent utiliser le clair de leur temps à être présents dans leur établissement, à être à l’écoute de tous les acteurs, de manière à ce qu’ils prennent en mains cet établissement et, que, du point de vue de la discipline, de la sécurité, de toute la responsabilité leur incombant, ils puissent jouer leur rôle.
Par ailleurs, il y a quelque chose que je ne devrais pas oublier : dans nos établissements scolaires, la Note de service en est déjà prise, les apprenants auront deux heures hebdomadaires d’activités culturelles et sportives ; les clubs de théâtre, d’arts plastiques, les sports individuels comme collectifs, notamment, tout cela sera exploité, pour deux heures obligatoires par semaine, pour que l’école vive, pour qu’elle mette en exergue les potentialités de nos enfants, parce que la manière dont nous travaillons, de 7 heures à 19 heures où l’école tourne en dispensant que des cours théoriques, ce n’est pas une bonne chose, il fait aérer cela par d’autres activités ludiques qui permettent à ces apprenants de développer d’autres compétences. N’oubliez pas que cette portion d’âge, qui est celle de nos apprenants, c’est l’étape où l’enfant doit mettre en place les fondamentaux pour pouvoir aller à l’âge adulte ; si vous voulez avoir un compétiteur ou un sportif de haut niveau, c’est à cette tranche d’âge-là qu’on doit pouvoir le préparer. Donc, nous instaurons les activités culturelles et sportives, dès cette rentrée 2016-2017, et puis, nos apprenants ne comprennent rien de notre culture ; nos danses, cela ne leur dit rien. Donc, il faut remettre en place cette culture-là, pour que l’école forme nos enfants dans toutes les dimensions de la vie. En liaison avec les directeurs d’établissement, chaque Direction départementale va définir le jour adéquat pour tenir ce type d’activités.



Parlant des revendications des enseignants, sommes-nous certains que nous aurons, d’abord, une rentrée effective, ce 3 octobre et, ensuite, une année scolaire apaisée où les cours puissent se dérouler de manière stable ?

Je suis aussi enseignant, je connais mon problème, je ne suis que le porte-parole des enseignants auprès de l’autorité, pour dire que nous n’avons aucun intérêt, enseignants et autorités, à ce que les cours ne démarrent pas, parce que les derniers résultats ont montré quand même que nous sommes tous responsables de ce qui est arrivé à nos élèves. Pour tout dire, les élèves qui ont passé le Bepc en 2015-2016 étaient au Ci en 2006. Donc, vous voyez ce que cela veut dire. Or, la période 2006-2016, c’est celle la plus tumultueuse que notre système éducatif ait connue ; il y a eu trop de mouvements, les programmes n’étaient pas exécutés à une proportion élevée et les apprenants passaient en classe supérieure. Donc, ce cumul de contre-performances, cela a fait un manque-à-gagner, du point de vue de l’apprenant, vu que concernant les compétences, les acquis ont été floués et, c’est en classe d’examen qu’on veut tout remettre en place.
Donc, nous n’avons pas intérêt à ce que l’année ne soit pas apaisée. Tout compte fait, le Gouvernement a déjà donné le top, à travers la rencontre de négociations avec les Centrales et les Confédérations ; nous leur avons expliqué toutes les mesures prises pour une bonne rentrée. Maintenant, il ne suffit pas de faire une bonne rentrée, il faut l’entretenir. Donc, nous sommes dans un dialogue permanent et, moi, au niveau de mon secteur, il faut être à l’écoute des enseignants, il faut dialoguer avec eux, il faut être proactif dans les actions à mener envers les enseignants, pour qu’on ne soit pas surpris par une crise de longue durée, comme ce qu’on a connu jusque-là. Tout compte fait, le Gouvernement est disponible et, nous avons un Gouvernement très très à l’écoute des travailleurs et, je pense quand même que les problèmes sont nombreux, dans notre secteur, et il faut avoir une programmation, en bonne et due forme, et régler les problèmes de façon cohérente, avec suite. Par exemple, nous avons beaucoup de dettes envers les écoles normales supérieures ; il faut pouvoir les rembourser pour que les textes soient appliqués. J’entends les enseignants qui réclament déjà qu’on les mette en formation. Les mettre en formation dans quelle école ? Si les écoles normales n’entrent pas dans leurs fonds, elles ne pourront pas payer les encadreurs. Il y a que le système lui-même est à reformer ; il y a de grandes réformes que le Conseil national de l’éducation mettra en place, dans quelques mois, pour que les problèmes récurrents puissent trouver des solutions, à court, moyen et long terme. Comme vous l’imaginez, aucun système éducatif ne peut être performant dans un climat non apaisé. Donc, il faut dialoguer, il faut être avec les partenaires sociaux, il faut être à l’écoute : voilà mon cheval de bataille, ma ligne de conduite.



Originellement, vous êtes Professeur de Mathématiques, vous êtes Inspecteur de l’Enseignement secondaire. Selon vous, quels sont les 7 principes cardinaux que vous conseillez aux apprenants pour qu’ils réussissent leur année scolaire qui commence ?

D’abord, il y a un principe qui ne dépend pas des élèves ; il faut pouvoir mettre à leur disposition des enseignants, c’est la première chose. Ensuite, tout élève qui commence une année scolaire a, pour objectif, la réussite. Alors, pour réussir, il faut des conditions. Très tôt, il faut se dire que, pour réussir, il faut des sacrifices ; qui dit sacrifices, dit se passer de certaines choses, par exemple, être toujours avec les portables, les écouteurs dans les oreilles, avec de la musique, du bruit, tout cela, non ! Il faut se passer de cela.
Comme troisième chose, il faut se dire qu’après le sacrifice, ça réussit toujours et, on réussit quand on s’organise bien. Donc, il faut s’organiser. Dans cette organisation, il faut pouvoir avoir le temps pour soi, le temps pour les études et, si on doit se faire encadrer, suivre bien ce que l’encadrement donne. C’est pour dire que le temps pour soi est important ; le travail individuel, je veux dire. Quel que soit ce que le maître fait avec vous, si vous ne le reprenez pas, si vous ne consacrez pas un temps pour vous-même, pour vous concentrer, ça ne marche pas. Quatrièmement, il faut être discipliné ; rien ne se fait dans l’indiscipline. Il faut être obéissant, discipliné parce que plus on est obéissant, plus on réussit ; cela n’a l’air de rien, mais c’est cela.
Cinquième chose : le respect du temps qu’on se donne. Cela veut dire que lorsque vous élaborez un chronogramme, vous devez pouvoir le respecter. Donc, s’il est l’heure des études, je m’y consacre. Si c’est l’heure de regarder la télévision, je le fais, sans oublier que je ne permettrai cela que les samedis soirs ; en semaine, un élève ne doit pas regarder la télévision.
Concernant la sixième chose, il s’agit de se surveiller, dans l’alimentation, dans le fait de se protéger, de dormir sous moustiquaire imprégnée ; ce sont de petites choses pour que l’élève soit présent aux cours, de corps et d’esprit. Donc, il faut se préserver et, ce faisant, l’alimentation est suivie par les parents. Mais, je sais qu’il y a des élèves qui sont en même temps parents aujourd’hui, qui n’ont personne ; c’est dur, mais je pense que la solidarité qui nous a toujours caractérisés au Bénin, fait qu’on peut toujours avoir le clin d’un oncle, d’une tante, de quelqu’un, … C’est difficile, mais je dis encore qu’il faut être respectueux de tout ce qu’on prend comme chronogramme chez soi.
Le dernier conseil concerne étudier au jour le jour, parce que les explications fraîches que les apprenants reçoivent dans une matière, il y a une fuite d’informations, quand on les reprend pas tout de suite, ce qui amène à avoir une connaissance biaisée, si on met du temps avant de reprendre ses cours. Donc, étudier au jour le jour , en suivant le chronogramme qu’on s’est donné, être présent en classe, suivre le professeur, se dire : « Si je ne comprends pas quelque chose, ce n’est pas encore la fin du monde, le professeur est là pour m’aider, je lui pose mes questions et je fais mes exercices, je cherche, je ne me précipite pas pour aller voir un corrigé quelque part, je cherche … ». Quand on cherche, c’est toujours bon. Même si l’on ne trouve pas ; quand l’apprenant rencontre son professeur ou son maître d’étude, le fait d’avoir cherché, cela met en place des éléments qui vont être très utiles pour vite comprendre l’explication qui sera donnée. Autrement dit, quand on ne cherche pas, on ne s’en sort pas. Il faut toujours chercher ; c’est pourquoi, nous, dans notre démarche de travail individuel, il revient à l’élève de faire un effort sur soi, de creuser et de voir, dans son tréfonds, ce qu’il peut proposer comme solution au problème qui se pose, avant que l’enseignant ne dise qu’il y a telle correction à faire, telles indications à donner pour le guider, afin qu’il arrive au résultat. Donc, je pense que le travail individuel est important ; il faut travailler au jour le jour, faire des recherches sur les exercices et, avant le jour de l’examen, on est prêt, parce que quand on travaille au jour le jour, on fait des révisions partielles chaque fois et, à la veille de l’examen, on est prêt.



Un appel aux parents d’élèves, M. le Ministre ?

Les parents d’élèves doivent suivre les enfants. Aujourd’hui, dans les grandes villes, ce qui se passe, c’est que nous allons au travail, nous déposons les enfants à l’école, nous revenons le soir, et avant qu’on ne le fasse, ils sont déjà au lit. Il revient à chaque parent de toujours feuilleter le cahier des apprenants, des enfants, chaque soir, quand ils rentrent, pour voir, au moins, ce qu’ils ont fait, dans la journée. Et, là, on s’assure au moins de ce que l’enfant a  vraiment été à l’école et, que, si, entre temps, on constate des choses, qu’on se rapproche de l’administration de l’établissement, très tôt, pour corriger les anomalies ; ce contact entre l’administration et les parents est très utile pour nous permettre à nous, parents, d’avoir des informations sur nos enfants et de les corriger, petit à petit, à la maison, de manière que les bonnes dispositions s’installent, au niveau de ces apprenants-là. Qu’ils veillent sur leur nourriture, et qu’ils se sacrifient toujours pour donner l’essentiel à ces enfants, parce qu’ils n’ont pas demandé à naître. Donc, on doit les aider, on doit les accompagner ; je pense que c’est le rôle de tout parent : savoir que son enfant est allé à l’école, remarquer ce qu’il a fait dans la journée, évaluer cela avec lui, chaque fois et, le weekend, faire un bon bilan de la semaine, avec lui. Le faire aura permis de jouer notre rôle de parents.


Propos recueillis par Marcel Kpogodo

Aucun commentaire: