« Nous t’avons
laissé t’enliser … et mourir … Nous sommes des criminels ! »
Cher François,
Si, désormais, nous
appelons ton numéro, ce n’est pas ta voix qui nous répondra. C’est fini … C’est
définitivement fini … C’est cruel, mais, c’est comme ça !
Ce qui me fait pleurer,
ce qu’à quelque niveau que l’on se trouve, nous sommes responsables de ton
départ tragique et définitif …
Nous t’avons vu t’enliser
et nous n’avons rien fait … Nous t’avons laissé t’enliser et … mourir … Nous
sommes des criminels et je n’en dirai pas plus.
Tous ceux qui me lisent
savent de quoi je parle, ce qui fait que je n’ai aucunement besoin d’entrer
dans les détails.
Nous sommes
responsables de ta mort, parce que, dans toute cette grande corporation
journalistique, que ce soit de la presse écrite, de la radio, de la télévision
ou de la presse en ligne, aucun d’entre nous n’a su trouver la méthode pour
toucher ton cœur et pour contribuer, par ce fait, à ce que tu ne t’enlises pas.
Hé, hé !
Du côté des puissants,
de ceux qui ont le pouvoir, quel qu’il soit,
Du côté de ceux qui ont
d’énormes moyens financiers,
Du côté de ceux qui
peuvent produire un impact, un résultat direct, positif et efficace sur toute
situation, d’un simple claquement de doigts,
Du côté des grands,
Vu ce que tu étais –
Pourquoi je dis « étais », tu es ce que tu es éternellement ! Donc,
je me reprends –
Vu ce que tu es,
Vu ta carrure
intellectuelle et professionnelle,
Vu ta mémoire à nulle
autre pareille sur les faits sportifs d’archives, une mémoire aussi éléphantesque
et fondamentale que celle de ce BAOBAB béninois de la presse sportive, ce
MONUMENT, cette ICÔNE – Tu comprends bien que je parle de l’inoubliable et
inclassable, Félix Sohoundé Pépéripé,
Vu ta manière
exceptionnelle de développer, de traiter l’information sportive, aux côtés de l’autre
excellent de Canal 3, en la matière, Sulpice Oscar Gbaguidi,
Vu tes chroniques sociales
des vendredis, toujours attendues, émouvantes et ’’interpellatives’’, comme
celles, pointues et remuantes, toujours de cet autre Sulpice Oscar Gbaguidi,
que tu as dignement remplacé lorsqu’il est parti en voyage,
Vu ta langue parfois
acerbe et impartiale, intelligente et gênante,
Vu tout ce que tu es de
bon et qui faisait que tout le monde se scotchait sur Canal 3, très tôt, tous
les matins,
Vu l’excellence que tu
es – Et, je ne te flatte pas, pour me complaire dans les basses et hypocrites exigences
de l’oraison funèbre,
Vu ce que tu es, en
tant que François Mensah et que personne ne sera jamais,
Penses-tu que tu serais
décédé, laissé à toi-même, au Centre National Hospitalier et Universitaire
Hubert Koutoukou Maga, ce mouroir dont la célébrité est faite en la matière pour
les causes de coma profond, si tu étais né sous un autre nom ?
Penses-tu que tu serais
décédé, laissé à toi-même, si tu avais été le fils de l’un de ces puissants qui
viennent, un à un, signer le livre des condoléances, qui passent te rendre
hommage, à titre posthume, quand l’irréparable est fait, certains poussant l’ignominie
jusqu’à laisser des enveloppes financières pour ta fille, Maéva, maintenant, comme
pour se racheter de leur crime de non-assistance à personne en danger ?
Penses-tu que tu serais
décédé, laissé à toi-même, si tu étais l’un des thuriféraires ’’ventrocrates’’,
du régime en place du Docteur Boni Yayi ?
Si tu étais dans l’un
ou l’autre de ces trois cas de figure, on t’aurait évacué, en un tourne-main,
mon Frère et, d’un de ces pays où les soins de santé inspirent respect, confiance
et salvation de la vie humaine, on aurait eu, peut-être, en direct, de tes
nouvelles d’une santé en reconstruction,
On ne se serait pas
contenté de demander qu’on prie pour toi …
François, je te le dis,
du fond du cœur, nous sommes tous des criminels, tout ce peuple qui t’adulait
tant pour ton courage de langue et d’intellect, tout ce peuple qui ne t’aimait
pas pour tes qualités d’ ’’aiguillonneur’’, d’objecteur de conscience, tout ce
peuple est criminel ! On devrait, autant les dix millions de Béninois que
nous sommes, nous arrêter un à un et, comme les policiers savent si bien le
faire, nous déférer devant un juge et nous faire mettre en garde-à-vue, en
attendant que notre culpabilité soit effectivement établie, que nous soyons,
chacun, jugés et condamnés à une peine bien réfléchie de prison !
Nous sommes un peuple
si méchant qui ne sait parfaitement gérer les situations que lorsque l’irréparable
est fait …
Le peuple béninois !
Nous sommes un peuple
qui excelle dans un métier formidable, celui du MEDECIN APRES LA MORT …
De mon côté, je te
voyais, quelques fois, dans mon quartier ; tu venais y rendre visite à un
ami qui est un peu devenu mon ami, parce qu’il était ton ami – Qui aurait
laissé passer la grâce, la chance d’être l’un de tes amis, toi qui nous aidais
beaucoup, professionnellement, en lisant, expressivement, la une de nos
journaux, sur l’incontournable ’’Actu- Matin’’ – Que Dieu bénisse à jamais
celui qui a inventé cette émission !
Que des messes soient
organisées à l’intention de la protection et de la longévité de ce génial qui a
inventé cette émission !
Que des prières soient
organisées dans tous les lieux de culte du pays pour ce créateur, pour le père
de cette émission qui, désormais, appartient au quotidien ces Béninois, ingrats
que nous sommes !
Que des messes de
remerciements et des prières de protection soient organisées à l’intention d’Issa
Salifou, de Malick Larry Gomina, des autres Berthe Cakpossa, André Dossa,
Hermann Aniambossou, Barnabé Salanon, de tous les autres journalistes, de tous
les techniciens, de tous les hommes de l’ombre comme de la lumière, pour la joie
de vivre qu’ils nous donnent, par l’existence qu’ils font, au quotidien, de
Canal 3-Bénin et de Canal 3-Monde !
Ce n’est pas seulement
le Docteur Boni Yayi qui mérite les messes et les prières …
De mon côté, donc, je
te voyais, quelques fois, dans mon quartier ; tu venais y rendre visite à
un ami qui est un peu devenu mon ami, parce qu’il était ton ami … Ai-je jamais
eu le courage de te parler ? Pour contribuer à ce que tu ne t’enlises pas
et que tu vives 33, 45, 65, et même 120, 132 ans ?
Je ne crois pas … Ma
pensée n’a jamais pu se matérialiser à travers des paroles bien mûries, pour me
faire entendre de toi.
Je peux dire que je
suis responsable de ta mort …
Et, je te le dirai,
très vulgairement : « Nous sommes tous dedans … Nous sommes tous dans
ta mort … »
Et, c’est regrettable.
Peut-être que ton départ pour la vie nous édifiera, édifiera beaucoup de gens …
Tu n’es plus là, mais,
contrairement à ce que tous croient, contrairement à ce que tes détracteurs de
tous ordres qui jubilent croient, tu es plus vivant que jamais !
Du lieu de lumière où
tu nous vois, du lieu de gloire où tu liras cette lettre, vois-tu tous les
hommages à ta personne de 32 ans ?
Vois-tu déjà ton nom
inscrit au fronton du Studio de la chaîne de télévision où tu officiais
courageusement, d’où toute ton équipe et tes collègues de travail continueront
à émerveiller le peuple béninois ?
C’est cela, la vie, la
vie éternelle …
Je crois que tu vis
plus que jamais, même si, à regret, je ne te verrai plus venir voir ton ami,
dans ma rue …
A toi, François, qui me
faisais le plaisir de lire sur ’’Actu-Matin’’, la une de mon journal, le
Quotidien ’’Le Mutateur’’ … Nous, tes confrères de la presse écrite, te rendons
un hommage particulier, pour ce service publicitaire que tu as continué à nous
rendre, jusqu’à une date plus que récente …
Merci, François …
Marcel Kpogodo
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