dimanche 27 juin 2010

Chronique - Rubrique Journal Le Mutateur

La question des valeurs à Cotonou

Bien qu’elle ne soit que la capitale économique du Bénin, Cotonou est la vitrine de ce pays. Peuplée d’un peu plus d’un million d’âmes, deux phénomènes y ont actuellement pion sur rue. Il s’agit, d’une part, de l’arnaque sur le net qui est devenue le fonds de commerce de certains jeunes et, d’autre part, la prolifération de ces boîtes de nuit dont la principale activité est le strip-tease. Ces arnaqueurs qui envahissent, à longueur de journée, les cybers-café, pour gruger, par le biais du commerce en ligne, des Occidentaux, justifient leur acte par la pauvreté. D’autres, plus culottés, affirment que c’est un juste retour des choses après l’esclavage, la colonisation et, notamment, celle de la France.

Quant à ces strip-teaseuses au sein desquelles on recense une forte colonie étrangère, elles sont également mues par l’appât du gain facile. Face à des hommes en mal d’inspiration sexuelle et dont la libido est passablement en panne, elles se font un plaisir de se dénuder pour donner des appétits sensuels et sexuels à ceux-ci.

Revenons à ces cybers criminels dont le rang grossit de jour en jour. En toute impunité, ils offrent le spectacle du culte de l’argent volé, de la médiocrité et de la paresse. Certains parents apportent leur soutien implicite à leurs enfants qui se livrent à ces actes répréhensibles. Ceux-ci constituent, à la nuit tombée, une partie non négligeable de la clientèle de ces boîtes de strip-tease qui pullulent aux quatre coins de la ville. Ils mènent un train de vie élevé sans avoir une activité officielle qui puisse permettre cela. Tout cela vient se greffer aux autres problèmes de la société béninoise : familles de plus en plus mono-parentales, envahissement des programmes de télévision et, par ricochets, de la vie de chaque ménage par des programmes télévisés de toutes sortes. Nos us et coutumes s’érodent au profit d’autres reçus de l’extérieur et qui, sereinement, s’enracinent dans chacune de nos vies. Avec le nombre sans cesse croissant de ces cybercriminels, c’est le Bénin qui en récole les retombées négatives, car il sera de moins en moins perçu comme une destination sûre en matière d’investissement. Concernant les boîtes de nuit, ce qui s’y passe n’est que l’arbre qui pourrait cacher une forêt plus dense et dangereuse. Proxénétisme, blanchiment d’argent, trafic de stupéfiants, autant d’activités qui peuvent y trouver un terrain fertile. Le Bénin et Cotonou, en particulier, pourraient devenir une plaque tournante du trafic de la drogue et du crime organisé. Avec les frontières poreuses du pays, personne ne peut affirmer le caractère licite de tout ce qui entre sur le territoire. La Guinée-Bissau est un sinistre exemple des conséquences politiques, économiques et sociales qu’engendre la pénétration de la mafia de la drogue dans l’appareil étatique.

Face aux deux faits évoqués précédemment, la mobilisation des autorités compétentes est timide et quasi-inexistante. Le ministère de l’intérieur diffuse actuellement sur les ondes des médias audiovisuels un communiqué, où il rappelle l’interdiction formelle des activités de strip-tease dans les boîtes de nuit. Quoi qu’il en soit, la responsabilité principale pour lutter et enrayer ces deux maux incombe au régime actuel. Depuis 4 ans, ne s’est-il pas auto-proclamé celui du changement ? Le pouvoir politique n’est-il pas aussi porteur de valeurs ? Les ministres ayant en charge les Technologies de l’information et de la communication, d'une part, et l’Intérieur, d'autre part, sont interpellés. Le premier pourrait saisir les personnes ressources nécessaires pour explorer la possibilité de bloquer l’accès depuis le Bénin aux sites web qu’utilisent ces arnaqueurs pour commettre leurs forfaits. Le second doit pouvoir décider de la suspension provisoire des activités des boîtes de nuit afin d’y voir plus clair. Et qu’on ne se réfugie pas derrière l’argument des pertes d’emploi que cela pourrait induire pour certains citoyens béninois. Une société sans repères court irrémédiablement dans le mur et, par ricochets, à sa perte.

Bernado Houenoussi

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