Le vendredi 29 mars
2019, les députés de la Majorité parlementaire, représentés par l’Honorable
Jean-Michel Abimbola, se sont prononcés sur la crise liée au déroulement des
élections législatives prévues pour le 28 avril 2019. Dans son propos, cette
personnalité, évoquant l’échec du consensus, est allé jusqu’à inviter le peuple
béninois à se tenir prêt à aller au vote à la date indiquée.
En réponse à cette
allocution, les députés de la Minorité parlementaire se sont prononcés à
l’Assemblée nationale ce lundi 1er avril 2019. En substance, il s’agit de
retenir qu’ils se sont désolidarisés de la responsabilité que leurs collègues
de la majorité ont voulu leur faire porter de l’inexistence du consensus et ont
situé les conditions dans lesquelles la majorité a été amenée à monter au
créneau. Ensuite est revenu le crédo cher à l’Opposition selon lequel des
élections législatives ne sauraient avoir lieu sans elle. A lire l’intégralité
des deux déclarations …
Marcel Kpogodo
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Siège de l'Assemblée nationale du Bénin |
Intégralité de la
Déclaration des députés de la Majorité parlementaire
Monsieur le Président
de l’Assemblée nationale ;
Mesdames et Messieurs
les députés ;
Chers collègues ;
C’est avec gravité que
nous soussignés, députés à l’Assemblée nationale du Bénin, après analyse de la
situation politique de ces derniers jours tenons à faire la déclaration dont la
teneur suit :
Depuis plusieurs jours,
et dans leur logique d’agitation du spectre de menace à la paix sociale,
certains acteurs politiques évoquent les pouvoirs que conférerait l’article 66
de notre Loi fondamentale comme moyen ultime à mettre en œuvre pour contraindre
à la participation de tous les partis politiques en délicatesse avec les lois,
aux élections législatives prochaines en lieu et place de la voie du consensus
prônée et demandée avec force par le Chef de l’Etat.
Nous voudrions dénoncer
cette nouvelle tentative de manipulation de l’opinion par cette démarche ridicule
et dangereuse du point de vue constitutionnel qui est une véritable ineptie
juridique.
En effet, l’article 66
de la Constitution précise clairement les circonstances dans lesquelles les
actions envisagées par l'opposition sont autorisées et possibles. Pour rappel,
il s’agit des articles 66 et 67 du titre III relatif au Pouvoir Exécutif.
L’article 66 dispose : « En cas de coup d' Etat, de putsch, d'agression par des
mercenaires ou de coup de force quelconque, tout membre d'un organe
constitutionnel a le droit et le devoir de faire appel à tous les moyens pour
rétablir la légitimité constitutionnelle, y compris le recours aux accords de
coopération militaire ou de défense existants.
Dans ces circonstances,
pour tout béninois, désobéir et s'organiser pour faire échec à l'autorité
illégitime constituent le plus sacré des droits et le plus impératifs des
devoirs ».
Toute interprétation
biaisée, maladroite, nocive et toxique de cet article qui amènerait nos
compatriotes à inciter et/ou à poser des actes de désobéissance civique et
tenter de troubler l’ordre public comme le promettent les défenseurs de cette
hérésie viendrait en violation des lois établies et ne pourrait qu’être
sévèrement punie.
Par ailleurs, dans la
perspective de trouver une issue à la situation politique qui prévaut en cette
veille d'élections, nous voudrions rappeler qu’à la plénière d’hier jeudi 28
mars 2019, les députés ont rejeté à l'unanimité moins une abstention, les deux
(2) propositions de lois dérogatoires pour défaut de consensus, conformément au
Protocole Additionnel de la CEDEAO. C'est fort de cela que le Président de
l’Assemblée nationale a, dans sa synthèse précisé qu’il fallait laisser une
dernière chance à la solution consensuelle et ce jusqu’à ce jour vendredi 29
mars 2019.
Nous profitons de cette
occasion pour rappeler à chacun et à tous que nous sommes à moins de 30 jours
de la date prévue pour le scrutin et informer que de nouvelles propositions de
lois dérogatoires ont été transmises par le Président de l’Assemblée nationale
à la minorité et à la majorité parlementaires pour approbation.
Mais depuis le matin de
ce vendredi 29 mars 2019 où nous devrions en discuter en plénière et jusqu’à
cette heure, nous attendons l’opposition qui serait partie consulter ses ténors
et ses responsables pour prendre des instructions sur la conduite à tenir.
Nous invitons par
conséquent l’opinion publique nationale et internationale à constater avec nous
que l’opposition à travers la minorité parlementaire poursuit le dilatoire,
jouant toujours avec les nerfs de nos populations impatientes d’une issue à ce
feuilleton qui n’a que trop durer.
En tout état de cause,
constatant cette attitude malsaine et vicieuse, nous venons marquer notre
totale désapprobation, et exprimons par cette même occasion notre vif regret de noter que notre opposition n’est
aucunement dans la logique de la recherche du consensus.
Nous prenons dès lors
solennellement acte du défaut du consensus tant attendu et décidons de nous en
tenir désormais au respect strict des textes en vigueur et du calendrier
électoral.
Nous appelons le peuple
Béninois à se tenir prêt pour exercer son devoir citoyen en se déplaçant
massivement pour aller voter le dimanche 28 avril 2019.
Nous vous remercions.
Intégralité de la
Déclaration de la Minorité parlementaire
ASSEMBLÉE NATIONALE :
Plénière de ce lundi 01/04/2019
Monsieur le Président
de l’Assemblée Nationale,
Chers collègues
Députés,
Peuple béninois,
Dans la soirée du
vendredi 29 mars dernier, nous avons entendu une déclaration lue à la tribune
de l’Assemblée Nationale par l’Honorable Jean Michel ABIMBOLA, au nom et pour
le compte de 36 députés membres du BMP. Dans cette déclaration, il est estimé
que le consensus n’est pas trouvé, du fait de l’opposition qui « à travers la
minorité parlementaire poursuit le dilatoire, jouant toujours avec les nerfs de
nos populations impatientes d’une issue à ce feuilleton qui n’a que trop duré
».
Cette déclaration mensongère
n’est qu’une illustration supplémentaire de la mauvaise foi qui a caractérisé
la majorité parlementaire tout au long du processus de recherche de solutions
pour des élections législatives inclusives.
Or en réalité, nos
collègues de la majorité savent bien que dans la mi-journée de ce vendredi, aux
environs de 13heures 30 minutes, les présidents des groupes parlementaires ont
été appelés par le Président de l’Assemblée Nationale dans son bureau, afin de
recevoir les différents avant-projets de propositions de lois dérogatoires.
Cette séance de travail qui a duré une heure environ, a été l’occasion pour
proposer à la majorité et à la minorité, de prendre contact avec la classe
politique, étant entendu que la question de la révision de la constitution a
refait surface.
A la demande des
députés de l’opposition de mettre le week-end à profit pour que le travail se
fasse sereinement afin que le lundi, l’étude en commission et plus tard la
plénière adopte les deux textes, le président OKOUNLOLA soutenu par les
présidents IDJI et AKE, ont martelé qu’il fallait en finir le vendredi, même
s’il faut aller jusqu’à deux heures de la nuit.
C’est sur cette base
que nous nous sommes quittés pour aller consulter les nôtres. C’est avec
étonnement qu’aux environs de 19 heures, alors que le Président de l’Assemblée
Nationale était dans son bureau attendant les deux parties aux négociations, et
nous, en pleine séance de travail autour des nouveaux avant-projets de
propositions de lois dérogatoires, avions appris qu’une déclaration se faisait
à la tribune de l’Assemblée Nationale. Que fut notre surprise d’entendre que
les présidents IDJI, OKOUNLOLA, AKE et l’honorable ADOMAHOU représentant le
président NAGO, ont signé cette déclaration, alors que tous, dans le bureau du
Président de l’Assemblée Nationale, ont proposé que nous travaillions jusqu’à
même tard la nuit pour une issue de sortie de crise.
Nous condamnons
fermement cette attitude de ce groupe de députés qui ne traduit pas une volonté
de recherche du consensus.
Monsieur le Président
de l’Assemblée Nationale,
Chers collègues
Députés,
Dans la résolution de
la crise, le Président de la République a désigné un facilitateur qu’est le
Président de l’Assemblée Nationale. Revenait-il à l’honorable ABIMBOLA, de
décréter l’échec des négociations alors que le facilitateur désigné n’a pas
encore déposé son rapport ?
N’est-ce pas là la
tricherie que nous avons toujours dénoncée depuis l’ouverture des pourparlers ?
Monsieur le Président
de l’Assemblée Nationale,
Chers collègues
Députés,
Peuple béninois,
Après cette forfaiture,
les faucons de la mouvance présidentielle ont pris tout le week-end pour
parcourir le pays et annoncer aux populations que seuls les deux partis privés
du Président de la République iraient aux élections le 28 avril. Ceci nous
laisse croire à un jeu flou dans le camp du Chef de l’Etat vis-à-vis de la
Nation toute entière. C’est la raison pour laquelle nous tenons à rappeler à
Son Excellence, Monsieur Patrice TALON, que le 06 avril 2016, à sa prise de
fonction, il a hérité d’un pays pas riche comme les grandes puissances, mais
heureux. Il a hérité d’un pays qui lui a personnellement tout donné et qui lui
a permis d’en être la première fortune, un pays démocratique qui a permis
vaille que vaille, le retour d’exil d’un de ses fils pour l’en faire Président
de la République. Mais aujourd’hui, ce sont les partisans de cet enfant prodige
qui veulent détruire ce beau pays.
Monsieur le Président
de l’Assemblée Nationale,
Chers collègues
Députés,
Peuple béninois,
Pour nous, il ne
saurait y avoir d’élections législatives sans l’opposition, car, il est
difficile de prendre tous les Béninois pour des incultes en leur faisant croire
que c’est seulement les partis politiques privés du Président de la République,
qui n’ont pas trois mois de vie, qui sont capables de prendre part aux
consultations électorales tandis que les partis d’opposition qui ont
régulièrement pris part aux joutes électorales, sont exclus de la compétition.
Monsieur le Président
de l’Assemblée Nationale,
Chers collègues
Députés,
Peuple béninois,
Cette déclaration de ce
groupe de députés de la majorité parlementaire est une provocation
inacceptable. Elle n’est ni plus ni moins qu’une tentative de passage en force
du BMP, et une volonté de confisquer le droit du peuple béninois à choisir
librement ses représentants.
Du haut de cette
tribune, nous invitons la classe politique, la société civile, les centrales
syndicales et la population béninoise toute entière, à se lever pour barrer la
route à l’exclusion, à l’arbitraire et à la remise en cause de notre
démocratie. Nous invitons de ce fait la population béninoise à se tenir prête
pour les mots d’ordre de l’opposition.
Nous réaffirmons notre
disponibilité à œuvrer pour la recherche d’une solution consensuelle pour des
élections inclusives.
En tout état de cause,
nous affirmons solennellement qu’il n’y aura pas d’élections sans opposition.
Vives les élections
inclusives !
Vive la démocratie !
Vive le Bénin !
Je vous remercie.
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