Face à l'animation de l’opposition
(Elle ne se fait pas sur facebook)
Depuis la fin de
l’élection présidentielle de mars 2016, la confirmation de l’élection de
Patrice Talon comme Président de la République, sa réception des charges des
mains de son prédécesseur, sa prestation de serment à Porto-Novo, la formation
du premier gouvernement du nouveau Chef de l’Etat, l’Exécutif n’a pas tardé à
se mettre à la tâche, prenant déjà position sur les dossiers sensibles de la
nation. Mais, depuis, un vide se fait sentir : une opposition qui puisse
s’exprimer sur les choix effectués par le Gouvernement, ce qui semble montrer
une certaine défection de Lionel Zinsou, candidat malheureux à cette
présidentielle.
Lionel Zinsou |
Lionel Zinsou, ancien
Premier ministre et bon perdant de l’élection présidentielle de mars 2016, n’a
pas encore pris la mesure du rôle politique qui lui incombe en tant que
candidat ayant vaillamment affronté Patrice Talon au second tour de ce scrutin.
Un rôle stratégique du chef de l’opposition. Dans tout pays démocratique qui se
respecte, cela va de soi que le candidat malheureux porte la voix de la frange
de la population qui n’a pas voté pour le président élu. Comme il s’agit du
Bénin, cette frange est naturellement complétée par les mécontents des
premières décisions prises et par le lot des déçus qui n’auraient pas trouvé
leur compte dans le partage des postes politiques à tous les niveaux.
De cette manière, il
s’impose pour Lionel Zinsou d’emboucher la trompette du chef de l’opposition
afin de commencer à prendre position sur les choix du Gouvernement de la
Rupture et du Nouveau départ. En effet, il y a un bon nombre de ces décisions qui
sont considérées comme salutaires
par certains et suicidaires par d’autres. Ainsi, elles font l’objet de
grandes acclamations ou de vives contestations, selon les camps. Il est
question, notamment, de la formation de la 1ère équipe de travail du
Chef de l’Etat, de la suspension des concours frauduleux, de l’abrogation des
18 décrets d’application de la Loi n° 2015-20 du 19 juin 2015 portant statut spécial des personnels des
forces de sécurité publiques et assimilées, de la position du Président de la
République à l’Elysée concernant les cadres béninois et, dernièrement, de la
suppression d’institutions étatiques créées sous le régime défunt et considérées
comme budgétivores. Ce sont autant de thèmes sur lesquels un camp adverse, une
voix politique d’en face doit bâtir une argumentation solide pour donner raison
ou tort au Gouvernement et, dans le cas où des choix ne seront pas appréciés,
faire des propositions alternatives.
Par ailleurs, un autre facteur qui appelle la constitution
d’une opposition réelle au régime du Nouveau départ reste le positionnement
politique à l’Assemblée nationale. Dans ce haut lieu de la politique, les
forces de l’ancienne mouvance présidentielle ont besoin d’être canalisées pour
éviter, d’une part, la disparition d’une tête de pont que sont les Forces
cauris pour un Bénin émergent (Fcbe) et, d’autre part, la débandade délétère
des députés de cette tendance politique et assimilés pour une destination
clairement définie comme étant celle de la mouvance du Nouveau départ. Cette
situation ne contribuera qu’à enfoncer la classe politique et à développer la
méfiance du peuple envers elle, sans oublier qu’elle va approfondir la fragilité
du système politique béninois qui aura montré une difficulté de reconfiguration,
de restructuration.
Particulièrement, si Lionel Zinsou émet des réflexions sur le
fonctionnement gouvernemental actuel, celles-ci sont lisibles, notamment, sur
sa page Facebook. En effet, la dernière déclaration du Président Patrice Talon
à Paris voyant le Bénin « comme un désert de compétences » a suscité
une réaction de la part de l’ancien Premier ministre sur ce réseau social, ce
qui reste largement insuffisant, vu que celle-ci n’a en rien fait l’objet d’une
visibilité médiatique. Ainsi, les détracteurs des réseaux sociaux et les
nombreux analphabètes qui n’ont pas le réflexe de s’y abreuver quotidiennement
auront raté la quintessence ironique des propos de Lionel Zinsou sur la boutade
de Patrice Talon.
L’opposition étant difficile, elle n’en demeure pas moins un
tremplin incontournable pour le bon fonctionnement démocratique de notre pays
et pour une candidature de qualité à la présidentielle de 2021 pour la
personnalité politique qui aura le courage de l’animer. En cas de défaillance
de Lionel Zinsou, pourquoi un Komi Koutché n’assumerait-il pas ce rôle si
stratégique ?
Ramane Aïsso
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