vendredi 5 janvier 2018

Les magistrats béninois s’engagent dans une grève dure, sèche, salée

A en croire la Déclaration rendue publique par l’Unamab

Le 2 janvier 2018, les Députés ont retiré aux magistrats le droit de grève, dans le cadre de l’examen de la Loi portant Statuts de la Magistrature, aux fins de l'amélioration des conditions de vie et de travail des membres de ce corps de métier. Deux jours après ce vote des parlementaires, les magistrats, réunis en Assemblée générale, au sein de l’Union nationale des magistrats du Bénin (Unamab), ont dénoncé la situation et ont opté pour une entrée dans une grève particulièrement drastique, dès la semaine prochaine.

Michel Adjaka, Président de l'Unamab
Une grève sur les cinq jours ouvrables « jusqu’au retrait de cette disposition liberticide de la nouvelle loi portant statuts de la magistrature », dès le lundi 8 janvier 2018. La décision prise, le jeudi 4 janvier, par les magistrats béninois, à l’issue d’une Assemblée générale qu’ils ont tenue, au sein de l’Union nationale des magistrats du Bénin (Unamab). Cet arrêt de travail est prévu pour faire l’objet d’une reconduction tacite toutes les semaines, à en croire la Déclaration de presse rendue publique, à la fin des assises …   


DECLARATION DE PRESSE DE L’UNAMAB

L’Union Nationale des Magistrats du Bénin (UNAMAB) s’est réunie en Assemblée Générale Extraordinaire ce jour jeudi 04 janvier 2018.
Etait inscrit à l’ordre du jour, le point relatif au retrait du doit de grève aux magistrats.
Après analyse de la situation, l’Assemblée Générale a relevé que le droit de grève est consacré par l’article 31 de la Constitution du 11 décembre 1990, qui n’est qu’une simple internalisation de l’article 8 du Pacte International relatif aux droits économiques, sociaux et culturels.
En décidant de sacraliser le droit de grève, le constituant a engagé l’Etat à reconnaître et garantir ce droit à tous les travailleurs, y compris les forces de défense et de sécurité.
Cette option s’explique par l’histoire de notre pays.

En effet de 1972 à 1989, le Bénin a fait la redoutable expérience de la période révolutionnaire particulièrement marquée par la violation massive des droits humains. Tirant leçon de ce douloureux passé, le constituant a prévu une batterie de dispositions destinées à assurer la protection de ces droits.

Au nombre des institutions chargées de veiller au respect des droits fondamentaux et des libertés publiques, figure au premier plan la Cour constitutionnelle.
Saisie le 13 janvier 2006 du contrôle de conformité à la Constitution de la loi 2005-43 du 29 décembre 2005 portant statuts général des personnels militaires des forces armées béninoises, la Cour constitutionnelle, par décision DCC- 06-034 du 04 avril 2006, a jugé que «Le droit de grève proclamé et consacré par la Constitution est un droit absolu au profit de l’ensemble des travailleurs(…). Le législateur ordinaire ne peut porter atteinte à ce droit».
Curieusement, lors du contrôle de conformité à la Constitution de la loi N° 2011-25 portant règles générales applicables aux personnels militaires et assimilés en République du Bénin, votée par l’Assemblée nationale, la Cour constitutionnelle a opéré un revirement de jurisprudence et a estimé que le droit de grève, bien que fondamental, n’est pas absolu.
Prétextant de cette nouvelle position de la Cour constitutionnelle, l’Assemblé nationale a, le 28 décembre 2017, retiré subrepticement le droit de grève aux agents de la santé, de la justice et de sécurité.
Non satisfait de ce coup de force constitutionnel, le 02 janvier 2018, lors de l’examen de la loi portant statuts de la magistrature, l’Assemblée nationale a confirmé son désir d’en découdre avec les magistrats en leur retirant le droit de grève par une disposition introduite dans cette loi.
Des débats parlementaires, il ressort que le nouveau statut vise à améliorer substantiellement les conditions de vie et de travail des magistrats. L’UNAMAB fustige cette manœuvre consistant à troquer le droit de grève, une liberté fondamentale, contre les avantages en nature ou en espèce.
Ne pouvant tolérer un recul démocratique, ni une vassalisation du pouvoir judiciaire et de ses acteurs, l’UNAMAB estime qu’il urge de riposter avec vigueur à la liquidation amorcée de la démocratie béninoise acquise de hautes luttes.
C’est pourquoi, elle décide d’observer, à compter du lundi 08 janvier 2018, jusqu’au retrait de cette disposition liberticide de la nouvelle loi portant statuts de la magistrature, un mouvement de grève de protestation de cinq (05) jours, tacitement reconductible, du lundi au vendredi.
L’UNAMAB rend l’Assemblée nationale et le gouvernement responsables des déconvenues qui résulteraient de cette fâcheuse situation.
Fait à Cotonou, le 04 janvier 2018.

L’assemblée générale.

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