jeudi 31 décembre 2009

Africités 5 à Marrakech


Vue de l'extérieur du Palais des Congrès de Marrakech

Africités 5


Une rencontre déterminante pour le développement local en Afrique


La cinquième édition du Sommet Africités 5, qui a eu lieu, du 16 au 20 décembre 2009, à Marrakech au Maroc, a permis, grâce aux sessions thématiques et spéciales qui l’ont animé, aux différents acteurs à l’échelon local en Afrique, d’échanger sur le thème de cette édition. Celle-ci portait sur la réponse des exécutifs locaux africains à la crise financière qui sévit actuellement.


Les participants à ces différentes sessions ont formulé des recommandations à l’endroit des maires, des ministres et de Cités et Gouvernements Locaux Unis d’Afrique (CGLUA), l’organisation qui regroupe tous les élus locaux africains et les associations nationales des communes, entre autres. Ces dites recommandations seront peaufinées dans les toutes prochaines semaines, pour être disponibles en mi-février 2010. Autre fait marquant de cette rencontre : les quatre-vingt (80) conventions qui ont été signées entre plusieurs villes des quatre (04) coins du continent africain. Quarante-sept (47) pays africains, trente-trois (33) du reste du monde, ainsi que cinq (05) mille participants ont pris part à ce Sommet. Lors de la cérémonie de clôture de cette rencontre internationale, Jean-Pierre Elong Mbassi, Secrétaire général de CGLUA a déclaré : « L’Afrique a beaucoup à donner à l’Afrique ». Ensuite, il a remercié tous les acteurs du Maroc qui ont fait d’Africités 5 une réussite à tous points de vue. Cela a fait véritablement de Marrakech « le cœur battant de l’Afrique en mouvement ». Il donne rendez-vous du 04 au 08 décembre 2012 à Dakar au Sénégal, pour Africités 6.



Bernado Houènoussi

mercredi 30 décembre 2009

Africités 5 à Marrakech


Awe Assane


Sénégal


Une synergie collective pour répondre aux problèmes de développement


Le Centre Arafat Excellence, situé dans le quartier du Grand Yoff à Dakar, au Sénégal, a pris le relais, dès 2002, de la Banque Mondiale qui finançait,depuis 1994, un projet destiné à renforcer la nutrition des enfants ayant moins de trois (03) ans et celle des femmes enceintes. Dans ce coin de Dakar où vit une population qui trime au quotidien, Awe Assane coordonne, avec d’autres personnes, les activités du Centre Arafat Excellence. Celles-ci embrassent plusieurs domaines et s’organisent, de concert avec les habitants du quartier. Lauréat 2009 du Concours Harubuntu pour le travail abattu avec son équipe, Awe Assane, dans cet entretien qu’il nous accorde, a bien voulu s’exprimer sur les différentes œuvres à l’actif de la communauté du Grand Yoff.



Journal Le Mutateur : Que faisiez-vous avant de vous impliquer dans le travail au quotidien du Centre Arafat ?


Awe Assane : De profession, je suis professeur de mathématiques. Mais, je suis également un agent de développement local. J’ai toujours été passionné par le fait d’être aux côtés des populations, pour qu’ensemble, nous trouvions des solutions aux problèmes qu’elles doivent affronter.


De 2002 à aujourd’hui, comment ont été financées les initiatives du centre Arafat? A titre d’exemple nous avons celles concernant l’accès au crédit, la gestion de l’environnement, la santé communautaire, l’alphabétisation, … ?


Nous avons appliqué une démarche participative. Au début, il y avait le Projet de nutrition communautaire (Pnc) financé par la Banque mondiale qui a pris fin en 2002. A travers ce projet, nous prenions en charge la nutrition des enfants de 0 à 3 ans, et le suivi nutritionnel des femmes enceintes. A un certain moment, en travaillant sur ce projet, on s’est aperçus que la plupart des femmes du Grand Yoff, qui étaient mariées, devaient travailler pour venir en appui à leur mari. Mais, le plus grand problème, c’est qu’elles n’avaient pas les moyens pour engager des nourrices pour leurs enfants. Nous avons pris l’initiative de mettre en place une garderie d’enfants, depuis le Pnc. Et, à la fin de ce projet en 2002, nous avons jugé indispensable de continuer, malgré qu’il n’y avait plus un financement. Nous avons fait une cotisation qui nous a permis de louer une maison et nous avons décidé de continuer les activités de la garderie d’enfants, car nos moyens financiers n’étaient pas suffisants pour nous permettre de continuer avec les suppléments alimentaires pour les enfants en bas âge et les femmes enceintes. Nous avons ainsi décidé d’ouvrir en 2002 une classe de Cours d’initiation (Ci) et, cette année, nous avons un cycle maternel et élémentaire complet, et un cycle moyen secondaire complet. Tout cela est financé par un apport forfaitaire des parents, car nous avons fixé un prix qui défie toute concurrence. Au moment où les écoles qui sont dans les environs du quartier du Grand Yoff proposent un prix variant entre quatorze mille (14.000 F) et vingt trois mille (23.000 F), le notre est fixé à sept mille deux cent (7.200 F). Et, cette somme nous sert principalement à faire face à notre loyer, de même qu’aux frais d’électricité, d’eau, de téléphone et pour l’Internet. Et, nous avons pu mettre en place vingt-cinq (25) emplois permanents. C’est dire donc que notre Centre ne fait pas un bénéfice. Tous nos projets sont donc financés, grâce à l’apport des parents et en impliquant la communauté.


L’une de vos ambitions est de promouvoir également les personnes handicapées. A ce titre, il y a une manifestation culturelle dénommée Handifestival, dont les promoteurs ont été, en 2008, lauréats du Concours Harubuntu. Est-ce que vous collaborez avec eux ?


Si nous sommes là aujourd’hui, c’est à travers Handifestival, même s’ils ne le savent pas. Comme notre objectif est de promouvoir les gens, le groupe d’handicapés, Xalam Star, que nous soutenons, participe à ce festival. Et, c’est cette participation qui nous a permis de savoir que les promoteurs avaient été lauréats Harubuntu. Nous avons pris connaissance de la vision du Concours Harubuntu et de celle d’Echos Communication. Nous avons découvert que nous partageons les mêmes convictions et, c’est pourquoi, nous avons décidé de participer à ce Concours. Xalam Star est l’invité d’honneur du Festival mondial des handicapés qui est organisé chaque année en France. Mais, pour la troisième année d’affilée, leur présence n’est pas effective à ce Festival, à cause du rejet de leur demande de visa. Nous espérons qu’un jour le consulat de France comprendra que c’est la promotion des personnes handicapées qui est mis en avant par ce Festival. Nous sommes contre l’immigration clandestine. Et, nous répétons, chaque jour, à toutes ces personnes que nous encadrons qu’il est possible de vivre décemment, tout en restant dans son pays et de développer, par la même occasion, celui-ci.


Est-ce que vous envisagez un jour de faire passer aux adultes qui suivent les cours d’alphabétisation au Centre Arafat l’examen national ?


L’année dernière, il y en a eu deux (02) qui ont été présentés, mais malheureusement, ils ont échoué. Mais, nous sommes prêts à essayer de nouveau. Ils savent que les cours du soir sont différents de ceux que suivent les élèves dans un cursus normal et qu’ils doivent travailler énormément. Et, nous avons pour ambition de les présenter, au fil de leur évolution, aux autres examens nationaux, après celui du certificat d’études. Et, l’exemple de Sembène Ousmane est là. C’est un autodidacte, qui a eu la renommée qu’on connaît, et dont les œuvres sont aujourd’hui au programme dans les collèges et lycées. C’est cet exemple que nous leur donnons.


Quelles sont les actions au programme du Centre dans les prochaines années ?


Nous sommes en train de mettre en place le site web d’Arafat Excellence, afin de démultiplier notre exemple et pour avoir plus d’échanges avec des personnes vivant partout dans le monde. Nous voulons aussi créer un centre hôtelier dans un quartier plus aisé que celui du Grand Yoff où se situe notre Centre. Nous voulons par ce biais, faire un bénéfice qui nous servira à financer certaines de nos activités. Nous souhaitons aussi créer un centre polyvalent qui sera chargé de la formation dans divers domaines des femmes, tels que la couture, le commerce. Dans la mesure de nos moyens, nous pensons avoir notre propre local car, comme je l’ai dit, nous sommes en location. Une éventuelle aide des autorités locales sera déterminante pour l’aboutissement d’une telle chose, car le mode actuel de financement de nos activités ne le permet pas. En tant que lauréat Harubuntu, nous souhaitons renforcer la synergie avec les autres lauréats et renforcer nos liens avec Echos Communication. Et, comme nous avons été cooptés pour devenir membre du conseil scientifique de la municipalité dans laquelle se situe notre quartier, c’est une opportunité pour mobiliser les autorités autour des problèmes de développement qui se posent dans le Grand Yoff.



Propos recueillis par Bernado Houènoussi

mardi 29 décembre 2009

Africités 5 à Marrakech


Mostafa Maataoui



Maroc





Harubuntu 2009 récompense le travail d’un élu local marocain





Mostafa Maataoui est, depuis une quinzaine d’années, le Maire de la Commune de Sidi Boumehdi, située à 120 km de la ville de Casablanca. A la tête de cette municipalité, il a concrétisé plusieurs projets. Ses initiatives lui ont ainsi valu d’être le lauréat du Concours Harubuntu 2009, dans la catégorie « Autorité Locale ». Dans cet entretien, cette personnalité évoque ses expériences personnelles et son projet.





Journal Le Mutateur : Pouvez-vous nous parler de votre parcours personnel ?





Mostafa Maataoui : J’ai été étudiant à l’Université de Grenoble où j’ai été initié au développement global, à grande échelle, avec les pôles de développement, c'est-à-dire le modèle mécaniciste. Après ma maîtrise, j’ai voulu changer de vision. Je suis allé à la Sorbonne et, là, dans le cadre de séminaires sur l’économie territoriale, j’ai appris à m’initier au développement par le bas, avec des approches inverses à celle du développement global, c'est-à-dire comment partir des collectivités locales pour construire les économies locales. C’est, en bref, mon parcours universitaire. Je suis rentré après au pays, et j’ai estimé qu’il fallait que je mette en pratique ces idées, car cela ne sert à rien de penser le développement sans le mettre en pratique. Je me suis lancé dans la politique en me présentant aux élections. En 1992, les pouvoirs publics ont procédé à un découpage territorial et, j’ai obtenu, dans ce cadre, la création de la Commune de Sidi Boumehdi.





Abordons maintenant le projet qui vous a permis d’être l’un des lauréats du Concours Harubuntu 2009…





Je tiens à rappeler que je l’ai conçu avant la naissance de la commune de Sidi Boumehdi. Et, je voulais, par le biais de ce projet, désenclaver cette municipalité qui n’avait ni routes, ni électricité, ni eau potable. Mais, il y a eu, par le passé, un développement agricole, car les colons français ont exploité environ trois mille (3.000) hectares qui ont été redistribués, par la suite, lors de la réforme agraire. Mais, la coopérative ne fonctionnait pas efficacement à cause de blocages humains. Il fallait donc changer cet état de choses, car il ne servait à rien de faire diverses infrastructures si le développement agricole était au point mort. On devait produire de la richesse. Pour ce faire, j’ai pensé à des partenariats. Le premier était avec un centre de recherche provincial spécialisé dans l’agriculture et les cultures céréalières. Nous avons essayé de faire un transfert des techniques qui étaient utilisées par ce centre, au niveau de ma commune, afin de doubler le rendement céréalier. L’autre versant était d’aider la Commune à élaborer un plan de développement intégré. Les premiers travaux d’identification ont donné une matrice de quatre-vingt (80) actions partant des infrastructures de base jusqu’aux choses culturelles, les fêtes villageoises, par exemple. Et, par un coup de chance, il y avait une organisation non gouvernementale italienne de la ville de Bologne, qui voulait mener des actions au Maroc, dans le domaine de l’agriculture. Cette ong a été orientée vers le centre de recherche provincial avec lequel nous étions en partenariat. C’est ainsi qu’est né notre deuxième partenariat, car cette organisation a estimé que nos initiatives cadraient avec les actions qu’elle avait pour objectif de mener au Maroc. C’est ainsi que le projet de développement intégré qui a été élaboré continue jusqu’à maintenant, avec une certaine souplesse, car il y a eu une série de sécheresses, et nous avons laissé les cultures céréalières et opté pour l’élevage. Mais, c’est plutôt des expérimentations, car je tiens à souligner que j’ai fait de ma Commune un cadre d’expérimentation et de recherche d’alternatives agricoles à des territoires en difficultés, à cause du changement climatique.





Quels sont vos projets d’avenir pour votre commune ?





J’essaye de m’adapter à la réalité actuelle qui se manifeste par la crise alimentaire qui se dessine à l’échelle internationale. J’ai aussi opté pour une diversification en développant une agriculture vivrière, et en introduisant l’arboriculture et le tourisme rural, qu’on appelle le tourisme vert.





Selon vous, le Prix Harubuntu que vous avez décroché vous incite à faire quoi ?





Il m’encourage à continuer et à travailler, en étant toujours au service de ma population. Je dois aussi donner l’exemple, pour les communes marocaines et africaines, en général.





Auriez-vous des suggestions à formuler aux lauréats du Concours Harubuntu ?





Ce concours est destiné à valoriser l’image de l’Afrique, par des projets qui existent. Mais, dans le cadre du mien, je travaille avec des Européens qui font un travail correct. Il faut, à l’avenir, penser à une reconnaissance de l’action de ces gens.





Marrakech a accueilli la cinquième édition du sommet Africités qui regroupe les élus locaux africains à divers niveaux. Y avez-vous participé ?





Bien sur, mais j’ai remarqué qu’il y avait peu d’ateliers sur ma problématique qui est relative au développement agricole. La plupart de ces ateliers étaient axés sur l’urbanisme. Ce qui est bien, c’est qu’il y en avait aussi sur la planification, la vision, la méthodologie, que peuvent pratiquer les communes urbaines et rurales.




Propos recueillis par Bernado Houènoussi

Africités 5 à Marrakech


Mireille Rolande Critié




Mireille Rolande Critié, Coup de cœur du Concours Harubuntu 2009


La mise en lumière d’une ambassadrice de la paix


Mireille Rolande Critié est la responsable du Projet d’éducation scolaire à la citoyenneté et à la paix (Presci), initié depuis 2007, par le Centre de recherche et d’action pour la paix (Cerap) en Côte d’Ivoire. Dans ce pays meurtri depuis 2002 par une guerre civile, ce projet a mis en place des groupes appelés « Villages de la paix » dans une quarantaine d’établissements secondaires publics et privés du pays, l’objectif poursuivi étant d’inculquer à ces apprenants, qui sont les premières victimes de la guerre, leurs devoirs, en tant que citoyens. Allons à la découverte plus profonde du contenu du Projet, à travers l'interview que Mireille Rolande Critié a bien voulu nous accorder.


Journal Le Mutateur : Quelles sont vos impressions en tant que lauréate du Concours Harubuntu 2009 ?


Mireille Rolande Critié : Je suis émue et je me dis que c’est la récompense de tous les efforts que j’ai fournis pour la réalisation de ce projet.

Votre projet a trait à la mise en place de groupes appelés « Villages de la paix ». Cela concerne des enfants qui sont inscrits au cours secondaire. Est-ce que vous envisagez de l’étendre aux écoles primaires ?

Il y a déjà quelques écoles primaires qui sont impliquées dans ce projet. Mais, il faut dire qu’avec les élèves de ce niveau, il y a beaucoup plus de temps à faire avant que les groupes soient mis en place et véritablement fonctionnels. Ce n’est pas le cas avec les élèves du niveau secondaire.

Le Projet avait, à un moment donné, un problème de financement. Qu’en est-il actuellement ?

Nous souhaitions avoir un financement sur plusieurs années. Mais, c’est finalement un appui pour cette année uniquement qui nous a été accordé, ce qui veut dire qu’à partir de 2010, on n’aura plus ce projet à mener.

Quel est l’accompagnement que vous donne Echos Communication, en tant que lauréate ?

C’est une formation afin de mieux gérer nos compétences, dans le suivi de nos activités.

Quelles sont vos perspectives d’avenir ?

C’est, dès 2010, travailler de façon plus scientifique sur le Projet, évaluer les résultats, connaître nos limites et recenser les difficultés que nous avions rencontrées lors de son exécution. Nous ferons ensuite des recommandations au Ministère de l’éducation nationale de Côte d’Ivoire.


Propos recueillis par Bernado Houènoussi

dimanche 20 décembre 2009

Africités 5 à Marrakech

Serges Vyisinubusa



Prix "Entrepreneuriat" du Concours Harubuntu 2009



La récompense d’un entrepreneur pluridimensionnel assez audacieux, ambitieux !



Originaire du village de Manyoni, dans la province Bururi, au sud du Burundi, Serges Vyisinubusa, un fermier, est le porteur de projet digne du programme d’un homme politique. C’est ainsi qu’une école secondaire, une centrale hydroélectrique, une raffinerie d’huile, un bureau de poste, une banque rurale et bien d’autres réalisations, viennent d’entrer, sous son impulsion, dans une phase concrète d'existence : un entrepreneur africain d'une rare grandeur de vue ....



Journal Le Mutateur : D’où puisez-vous une telle générosité ?



Serges Vyisinubusa : Je la puise directement chez moi, car ma foi m’oblige à faire du bien. J’ai constaté que, dans mon village et, surtout, dans ma région natale, il y avait de grands défis à relever ; il n’y avait pas d’eau, ni l’électricité, ni de routes, pour ce citer que cela. Je suis un opérateur économique vivant à Bujumbura, la capitale du Burundi et, les visites que je fais régulièrement dans ma région m’ont permis de connaître réellement les conditions de vie. Partant de cela, j’ai songé à aider ma région, afin qu’elle s’épanouisse et qu’elle se développe. C’est pourquoi, j’ai contribué à l’implantation de toutes ces infrastructures.



Quels sont vos projets d’avenir pour votre village ?



C’est d’abord entretenir les routes d’accès entre mon village et la capitale, et faire la tracée d’autres routes, afin de désenclaver totalement mon village. Mais, il faut aussi veiller à la bonne marche des autres initiatives, telles que la centrale hydroélectrique, la banque rurale, etc.

Est-ce que les autorités de votre village sont au courant de tous ces projets ?



Pour le tracée des routes, il faut faire une étude sur l’impact que pourrait avoir sur l’environnement ces différents aménagements ; il y a la protection de l’environnement qui prime. C’est après cela que les autorités donnent leur accord. Donc, même si elles n’ont pas contribué financièrement à ces projets, elles ont leur mot à dire.



Que pensez-vous du Concours Harubuntu, dont vous êtes l’un des lauréats 2009 ?



C’est un concours très encourageant. Ils sont venus dans mon village pour voir mes différentes réalisations, les entreprises que j’ai mises sur pied, c'est-à-dire qu’ils ont estimé qu’il y avait de la valeur chez moi et puis, ils m’ont récompensé en me donnant ce Prix Harubuntu.



Les bénéficiaires de vos projets, que soient les habitants de votre village, sont-ils au courant de ce Prix Harubuntu 2009 qui vous a été décerné ?



Ils connaissent la nouvelle car, juste avant de venir ici, au Maroc, je les ai informés de l’objet de mon voyage. Et, ils étaient très contents et sont impatients de me voir de retour dans notre village, avec ce Projet.


Est-ce qu’il y a déjà des cas d’opérateurs économiques de votre pays qui connaissent votre sens de l’entrepreneuriat et qui suivent votre exemple, en initiant des projets dans leurs régions d’origine respectives ?



Ils sont au courant, car la télévision burundaise vient souvent dans ma région, pour faire des reportages sur tout ce que j’entreprends, pour l’amélioration des conditions de vie des populations. Et, quelques-uns commencent déjà à m’imiter, et cela me fait plaisir, car je deviens, du coup, un modèle sur place et même dans la sous-région. J’aimerais donc, par exemple, exporter la technologie de cette micro-centrale hydroélectrique vers les autres pays de la région et les autres coins de l’Afrique.



Quelles sont les initiatives que prennent ces différentes personnes qui ont suivi votre exemple ?



Nous sommes dans un pays d’élevage et d’agriculture. Et, souvent nous faisons une agriculture de prestige. Pour leur part, ces personnes élèvent des vaches laitières, de qualité et qui produisent du lait et de la viande. Elles font aussi des semences, pour quelques-unes d’entre elles, des semences de pommes dont la production est bonne.




Pour finir notre entretien, que diriez vous ?


J’encourage nos frères africains à entreprendre ; qu’il n’ait pas peur de se lancer dans cette voie. Il faut commencer par de petites initiatives, afin de parvenir, plus tard, à d’autres qui seront plus grandes. On ne perd pas, quand on entreprend, mais on apprend beaucoup de choses.



Propos recueillis par Bernado Houènoussi, depuis le Sommet Africités à Marrakech.

Africités 5 à Marrakech


Mamadou El Hadj Kane, Maire du Village de N'gor

Concours Harubuntu des Porteurs d’Espoir en Afrique

A la découverte de Mamadou El Hadj Kane

Maire du Village de Ngor au Sénégal, Mamadou El Hadj Kane est le lauréat 2008 du Concours « Harubuntu » dans la catégorie « Autorité Locale ». Dans ses réponses à nos questions, il faut sentir une personnalité pleine de ressources.

Journal Le Mutateur : Pouvez-vous rappeler à nos lecteurs le problème auquel était confronté la plage de N’gor ?



Mamadou El Hadj Kane : Quand nous sommes arrivé à la tête de la collectivité locale en 2002, le constat qui se dégageait était que la plage de N’gor était jonchée d’ordures ménagères et de sachets plastiques. Mais, parallèlement, il y avait des cas de noyade, qui étaient constatés par les sapeurs pompiers et, chaque année, on enregistrait des morts. En général aussi, ce sont les jeunes qui prennent l’initiative d’installer des tentes qu’ils louent sur les plages, afin de se faire un peu d’argent. Et, la plage est également le lieu de travail des pêcheurs. Il y a aussi le fait que N’gor est un site touristique où cette activité a démarré en 1952 par la construction de l’hôtel N’gor Dia Rama. Et, quand nous sommes arrivés, il fallait trouver des solutions à ces différents problèmes parce que la fréquentation de la plage était forte mais on notait aussi ces cas de noyade.


Parlez-nous maintenant du projet qui vous a valu d’être distingué par le jury d'Harubuntu 2008 ...


C’est ainsi qu’au niveau du Conseil municipal, nous avons réfléchi et conçu un projet de mise sur pied d’un comité de gestion participatif. Nous avons estimé que certaines mesures radicales ne pouvaient atteindre les résultats escomptés. Nous avons convié à une réunion toutes les parties prenantes, en l’occurrence, l’association des jeunes plagistes, celle des pêcheurs, et les hôteliers, dans un cadre de concertation qui nous a permis de mettre sur pied ce Comité de gestion, piloté par la Mairie. Le président de ce Comité était, en même temps, celui de la Commission « Environnement-Pêche » de la Mairie, et il était accompagné dans cette tâche par son adjoint et par le comptable de la Mairie. Chaque entité, c'est-à-dire la Mairie et les associations des jeunes plagistes et celle des pêcheurs, avait délégué trois membres qui ont constitué le Comité de gestion. Dans le même temps, le Comité de gestion a pris l’initiative de faire appel aux sapeurs-pompiers pour la formation de vingt-cinq (25) jeunes aux métiers de sauvetage et de surveillance de baignade, afin que nous n’ayons plus ces cas de noyade. Vingt cinq (25) autres jeunes ont été engagés pour la collecte des ordures et déchets qui encombrent la plage, et pour le nettoyage quotidien de celle-ci. Une fois la mise en place de tout cela terminé, nous avons créé une taxe sur l’environnement, en tenant compte des textes qui régissent la décentralisation. Tous ceux qui viennent sur la plage pour diverses choses payent obligatoirement, avant d’y accéder, une somme de 200 Fcfa. C’est la plage l’a plus fréquentée à Dakar, car nous accueillons entre cinq mille (5000) et sept mille (7000) excursionnistes, durant les grandes vacances. Et, la collecte de ces fonds nous permet de faire fonctionner ce Comité de gestion. Comme vous le voyez, nous avons fait d’une pierre deux coups en réglant les problèmes de la plage et en créant cinquante emplois pour des jeunes. C’est donc cela qui nous a valu notre Prix. Et, nous comptons pérenniser cette initiative et, ce, au moins jusqu’au terme de notre mandat.



Votre initiative porte donc sur une gestion collégiale de la plage de N’gor dont vous êtes un élu. La mobilisation des populations autour du projet est-elle toujours la même ?



Au début, c’étaient des intérêts divergents qui étaient en place et, le plus difficile était de convaincre les uns et les autres, afin qu’ils y adhèrent. Mais, l’investissement et la persuasion que nous y avions mis a rassuré les différents protagonistes et le résultat est là. Tout le monde y adhère et s’est approprié le projet. Imaginez-vous qu’avec cela, un jeune qui était au chômage, a la possibilité d’avoir, pendant cinq (05) mois par an, le salaire moyen d’un fonctionnaire au Sénégal. Ce n’est plus maintenant un projet de la mairie, et ils se le sont appropriés et, c’est l’essentiel afin qu’ils puissent le défendre au maximum.



Les résultants qui ont été obtenus vous ont-ils incité à proposer votre projet à d'autres élus locaux du Sénégal dont les localités sont confrontées au même problème que la plage de N’gor ?



Nous ne sommes par allés jusqu’à proposer ce modèle à d’autres collègues. Mais, il y a des maires qui se sont rapprochés de nous, en l’occurrence, le Maire de Point E, qui se trouve dans le Département de Dakar, qui aimerait mettre en branle un tel projet dans sa commune. Il y a eu des réunions entre les commissions « Environnement » des deux mairies, et je pense que le fait de mobiliser les personnes sur les projets est une option que nous avons faite et elle ne concerne pas uniquement la gestion de la plage de N’gor. C’est ainsi que nous avons eu, au début de notre mandat, à régler le problème de l’assainissement au niveau du village. Aussi bien cet aspect que celui concernant l’eau constitue des contraintes pour les communes africaines. Nous avons pu, avec un financement de trois cent millions (300.000.000) de F Cfa de la Banque mondiale, régler le problème de l’assainissement, par un système nouveau qu’on appelle « Survie Collectif », qui nécessitait la mobilisation de toutes les familles de la commune, afin qu’elles y soient connectées. Par la stratégie de mobilisation générale, nous avons pu faire adhérer tout le monde au projet. Mais, cela ne suffit pas, car il faut que la Mairie, avec ses propres moyens, participe à l’accompagnement de ces populations, ce qui fait que, là où, pour être connectées, les populations devaient payer une somme de vingt-deux mille (22.000 ) F Cfa, la Mairie a fait une subvention de dix millions (10.000.000) de F Cfa, qui a permis de faire baisser cette souscription à sept mille cinq cent (7.500) F Cfa. Donc, il faut que les autorités locales fassent des efforts, afin de faire adhérer les populations à leurs projets.



Une année s’est écoulée depuis votre consécration. Avec le recul, quelles sont vos impressions ?


Mis à part le Prix Harubuntu qu’on reçoit, lors d’une cérémonie officielle, il y a un accompagnement qui est fait par l’ONG belge, Echos Communication. C’est ainsi que, il y a quinze (15) jours, Echos Communication a fait venir sur la plage de N’gor une équipe de la Radio Télévision Belge de la communauté francophone (RTBF), pour trois séries d’émissions, en direct. Cette diffusion nous a permis d’avoir une meilleure visibilité, au niveau de ce pays. Au cours de ces émissions, des personnalités locales ont été invitées. Il est aussi à noter que les décideurs de la Commune, tels que la chefferie traditionnelle, les médecins, ont bénéficié d’une formation sur les neurosciences. Il est possible que cet accompagnement nous permette d’avoir, dans l’avenir, d’autres retombées au niveau de notre Commune, par exemple, par le fait que nous pourrions avoir de nouveaux bailleurs de fonds.

Auriez-vous d’éventuelles suggestions à formuler aux promoteurs du Concours Harubuntu ?



Ce Concours ne s’intéresse qu’à l’Afrique francophone, pour le moment. Et, à mon humble avis, il est temps qu’il regarde aussi du côté de l’Afrique anglophone, lusophone, par exemple, car l’Afrique est une et indivisible. Il est temps d’y associer les pays de ces zones linguistiques, afin de donner à ce Concours une envergure mondiale. Et, je pense que, Echos Communication est déjà dans cette dynamique, à travers l’antenne qui a été installée, depuis un an, à Rabat au Maroc, et qui pourra faire la promotion du Concours en Afrique.

Quels sont les autres problèmes auxquels est confrontée votre municipalité ?


Les problèmes sont innombrables. La question fondamentale en Afrique, maintenant, est l’emploi des jeunes, même si ce n’est pas une compétence transférée. Et, pour le cas de mon pays le Sénégal, et, ce, lors de la campagne précédant les dernières élections locales du 29 mars 2009, les différents contacts que nous avons eus avec la population, les jeunes, nous ont permis de voir que c’était l’une de leurs préoccupations majeures. C’est pourquoi, nous avons pris l’engagement d’organiser un forum avec tous les opérateurs économiques de notre zone, parce que nous avons la chance d’être dans une commune qui est la plus prisée par les touristes qui viennent à Dakar, à cause de la plage. Et, nous avons aussi l’opportunité d’avoir des services de l’administration publique sénégalaise qui s’installent, de même que des institutions bancaires. C’est l’une des rares communes de Dakar qui a une extension, une réserve foncière qui nous permet d’avoir toutes ces infrastructures. Et, en relation avec tous ces jeunes et ces différents opérateurs économiques, il est possible de concevoir un projet qui puisse permettre aux jeunes de s’intégrer dans le circuit de l’emploi. Indépendamment de cela, il y a des difficultés, car comme pour toutes les communes du Sénégal et, principalement à Dakar, il y a la récurrente question de l’énergie. Il y a un problème au niveau de la société chargée de l’électricité, l’éclairage public fait défaut dans la quasi-totalité des communes de la région de Dakar. La conséquence, c’est l’insécurité dont la gestion retombe sur les maires qui n’en sont pas responsables. Le programme mis en place par l’Etat sénégalais pour éradiquer ce problème, je l’espère, règlera cette question. Les problèmes sont complexes, on peut en parler toute une journée, et nous devons redoubler d’efforts, pour prendre à bras-le-corps le développement local de nos communes.


Nous sommes actuellement à Marrakech où se déroule la cinquième édition du Sommet Africités, qui regroupe les élus locaux du continent africain. Avez-vous participé à certaines sessions de cette rencontre ?



J’ai participé, depuis que nous sommes là, à des rencontres sur des thèmes précis. C’est ainsi que j’ai pris part, particulièrement, aux activités organisées par Echos Communication qui, en réalité, a pris en charge toutes les dépenses entrant dans le cadre de ma présence à Marrakech. L’une de ces activités avait rapport au leadership que devait développer l’élu local pour prendre à bras le développement local. Les discussions étaient très animées, et je pense que tout ce qui a été dit, avec des exemples précis concernant nos expériences personnelles, en tant que Maire, par moi et par Mostafa Maataoui, le Lauréat 2009, dans la catégorie "Autorité Locale" du Concours Harubuntu, pourraient servir à d’autres pour faire de la participation et de la mobilisation sociale des populations un credo pour la mise en branle de certains projets.


Avez-vous un dernier mot à ajouter ?


Je félicite le Maroc car l’organisation de cette rencontre qui a regroupé environ cinq mille (5000) personnes est parfaite. J’ai une expérience de ce genre de rencontres, car j’ai la chance de travailler aussi au ministère sénégalais du tourisme. Ce n’est pas une mince affaire. J’en profite pour annoncer que le Sénégal est candidat pour l’organisation de la prochaine session. Et, je pense que nous avons les moyens hôteliers et les ressources humaines pour cela, parce que nous avons organisé en 1999 et en 2009 les sommets de l’Organisation de la Conférence Islamique (OCI), par exemple. Il s’agit donc de s’engager, dès maintenant, pour organiser correctement cette rencontre, pour le bien des collectivités locales africaines.



Propos recueillis par Bernado Houènoussi, depuis le Sommet Africités 5 de Marrakech, au Maroc.



Africités 5 à Marrakech


Chérif Elvalide Sèye




Suite à l'Atelier "Médias" organisé par Echos Communication


Chérif Elvalide Sèye donne son avis


Chérif Elvalide Sèye, Chef du Bureau de Dakar et Rédacteur en chef de l’hebdomadaire Les Afriques, contributeur à l’Atelier "Médias", organisé à Marrakech par Echos Communication sur le thème « Le traitement médiatique de l’excellence africaine », se confie à nous, par rapport à quelques préoccupations essentielles de l'heure.


Journal Le Mutateur : Quelle est la place des élites dans le processus de changement de l’image de l’Afrique ?


Chérif Elvalide Sèye : C’est une place essentielle, parce que ce sont les élites qui dirigent les sociétés. Et, une société est d’abord perçue à travers ses élites. Malheureusement, les élites, en tout cas, gouvernementales ne se comportent pas comme cela se devrait. Et, je pense que c’est l’un des grands problèmes de notre continent ; quand on entend des Chefs d’Etats africains dire, qu’ils sont derrière Sarkozy, c’est un scandale. Un pays en face de tout un continent, et il se trouve quelqu’un pour dire : "Nous sommes derrière toi", alors que nous sommes ceux qui ont les ressources. Ces propos ont été tenus dans le cadre de la conférence de Copenhague, où s’il y a quelqu’un qui a des atouts,c’est bien l’Afrique ; l’Afrique ne participe qu’à 3% de la dégradation du climat par ses émissions carboniques, la deuxième réserve forestière du monde, qui peut sauver la planète, est en Afrique. Nous sommes cinquante-trois (53) pays et, bientôt, nous serons à un milliard d’habitants. Alors, si, avec tout cela, il y a quelqu’un qui affirme que nous sommes tous derrière un autre, je pense que c’est un désastre. Je pense que la place des élites est primordiale, c’est à elles de montrer que l’Afrique s’émancipe. Elles doivent aussi croire en cette émancipation, afin que les autres puissent y croire.

Pourquoi n’y a-t-il pas encore ce déclic au niveau de ces élites ?

Je pense que les élites doivent prendre conscience de leurs forces et faiblesses et prendre réellement la mesure du rôle qu’elles sont à jouer. Et, à partir de ce moment, elles pourront jouer le rôle qui est le leur.


Propos recueillis par Bernado Houènoussi, depuis le Sommet Africités 5 de Marrakech, au Maroc.





Africités 5 à Marrakech


Une vue du podium de l'Atelier


Activités d’Echos Communication à Marrakech pour le sommet Africités 5


Un atelier ''Médias'' pour aborder l’excellence africaine



Un plateau de choix a réuni, en la matinée du vendredi 18 décembre 2009, dans la salle Karam du Palais des Congrès de Marrakech, des personnalités provenant d’origines diverses. Elles étaient présentes dans le cadre d’un atelier ''Médias'', organisé par l’ONG belge Echos Communication, autour du thème « Le traitement médiatique de l’excellence africaine ».


Falila Gbadamassi, journaliste au quotidien panafricain en ligne Afrik.com, Ferriel Berrales Guigny, Directrice de Rédaction à New African Woman, Colette Braeckman, journaliste au quotidien belge Le Soir, Joseph Danjié, cameraman-réalisateur à la Cameroon Radio Television (CRTV), Cherif Elvalide Sèye, Chef du Bureau de Dakar et Rédacteur en chef de l’hebdomadaire Les Afriques, tels sont les participants réunies par Echos Communication pour apporter leur contribution au thème, "Le traitement médiatique de l'excellence africiane". Devant un auditoire composé de journalistes et de participants au Sommet, ils ont partagé leurs expériences professionnelles et l’opinion qu’ils ont de ce thème. Falila Gbadamassi, d'Afrik.com, rappellera que ce sujet s’inscrit dans la dynamique des nouvelles technologies qui constituent une formidable opportunité pour parler de l’Afrique, de même qu’un exceptionnel outil d’expression. Pour eux, les lignes sont en train de bouger. Et, aujourd’hui, les difficultés économiques qu’affrontent les rédactions de presse européennes sont, en fait, un bien pour l’Afrique. C’est ainsi que, dans quelques années, ce sont les journalistes locaux qui parleront de leurs actualités sur ces différents médias européens, car ceux-ci ne pourront plus envoyer leurs journalistes sur le terrain. Le traitement de l’excellence africaine sera alors changé. Ferriel Berrales Guigny, d’origine tunisienne, quant à lui, dit s’inscrire dans un profond panafricanisme : « Je suis dans mon âme plus noire que la femme noire ». Selon elle, tout dépend du traitement que l’on fait de l’information, car si elle est frontale, elle n’atteindra pas ses objectifs qui sont de revaloriser l’image de l’Afrique. Les difficultés qu’affronte son magazine sont nombreuses, la crise de la presse papier étant passée par là. Mais, elle pense qu'il faut tenir bon malgré tout, car son magazine milite pour la promotion de la femme africaine.


Les autres contributeurs


Colette Braeckman, journaliste depuis une trentaine d’années, travaille depuis au journal belge Le soir, où elle s’est spécialisée dans la couverture de l’actualité africaine. Elle a mis en exergue deux faits, l’un concernant les dernières élections qui se sont déroulées, en 2006, en République Démocratique du Congo (RDC); le matraquage médiatique autour de ces scrutins a voulu qu’on mette uniquement sur le compte de l’Organisation des Nations Unies (ONU), la bonne organisation de ces élections alors que, s’il y avait eu un problème, cela aurait été la faute du peuple congolais. La Tanzanie, qui accueille depuis plusieurs décennies, sur son sol, des réfugiés de différents pays africains, doit recevoir un cachet spécial, affirme-t-elle. C’est le pays le plus hospitalier du monde, mais malheureusement ce n’est jamais mis en avant. Joseph Danjié, qui a reçu, entre autres distinctions, celle du Prix « Entreprenariat » 2008 du Concours Harubuntu promu par Echos Communication, a mis l’accent sur le fait que l’image de l’Afrique était plus traitée par la conséquence que par les faits. Et, dans son inconscient, le journaliste occidental est plus porté à parler des faits négatifs et, ce, même quand il pourrait explorer les aspects positifs qui ne manquent jamais. Pour Cherif Elvalide Seye, l’Afrique est multiple et diverse, et c’est d’ailleurs ce qui justifie le nom du journal dans lequel il exerce : « Personnellement, je travaille depuis plus de 30 ans. J’ai commencé au quotidien Le Soleil, et jamais je n’ai nourri de complexes envers l’Europe, dans le traitement de l’information ». Selon lui, il n’y a plus de tabous en termes de traitement de l’information en Afrique.

Cet atelier était animé par Jean-Luc Martin-Largardette, rédacteur du journal en ligne Ouvertures, et avait, comme Rapporteur, Jean Kabuta, Professeur en linguistique et littérature africaine à l’Université de Gand en Belgique. Tous deux ont accompagné les différents orateurs dans leur prise de parole.

Bernado Houènoussi, du Sommet Africités 5 de Marrakech, au Maroc.

vendredi 18 décembre 2009

Africités 5 à Marrakech


Moukaram Oceni, Maire de la ville de Porto-Novo



En marge des travaux du Sommet Africités 5 à Marrakech



Trois questions à Moukaram Oceni



Moukaram Oceni, Maire de la ville de Porto-Novo, a accepté de nous confier ses impressions, en tant que participant au Sommet Africités 5 de Marrakech au Maroc, et nous précise très succintement quelle exploitation il compte faire des acquis de cette grande rencontre internationale.



Journal Le Mutateur: Quelles sont les impressions du Maire que vous êtes, en tant que participant à cette 5è édition du sommet Africités ?



Mes impressions sont très bonnes. Je prends part à cette rencontre d’élus et de décideurs de l’Afrique, qui, habituellement, est un lieu où on partage les expériences de chacun pour mieux gérer nos communes. Je suis ici pour cela et cela se passe bien.

Que vous inspire le thème d’Africités 5 ?


C’est un thème très intéressant, car c’est la réponse des élus locaux africains à la crise mondiale. Nous sommes tous confrontés, en tant qu'acteurs locaux, à plusieurs défis en Afrique. Ce n’est pas la première crise que nous connaissons, car nous avons d’abord eu une crise alimentaire, puis énergétique, même si celle-ci date de quelques années. Nous connaissons, depuis un an maintenant, la crise financière internationale. La première conséquence est que les ressources vont beaucoup plus se raréfier au niveau mondial. Il faudrait que nous utilisions notre génie pour détecter en nous-mêmes, sur notre territoire, à l’intérieur de notre population, les moyens d’augmenter nos ressources fiscales et autres, afin de mieux financer nos investissements qui sont utiles pour nos populations.


En tant que maire de la ville de Porto-Novo, quelles sont les actions que vous menez dans le sens d’apporter des solutions à cette crise qui concerne également votre ville ?


Moi, je suis ici venu pour apprendre, je collecte des infos, je rencontre des gens et je mettrai en application les bonnes méthodes et applications que j’aurai connues ici.


Propos recueillis par Bernado Houènoussi, du Sommet Africités 5 à Marrakech.









jeudi 17 décembre 2009

africités 5 à Marrakech


Déo Baribwegure




Déo Baribwegure, au sujet de Kicora :







« Notre projet était une bougie, à laquelle Echos Communication est venue donner plus d’éclat »







Kigoma, une région du Nord-ouest de la Tanzanie, est délabrée sur le plan économique et social. Partant de ce constat, Déo Baribwegure a initié, depuis 2007, Kicora, un projet d’éducation destiné aux personnes ayant dépassé l’âge de la scolarisation. Son initiative lui a valu d’être le lauréat de la catégorie « Société Civile » du Concours Harubuntu 2008. A travers cet entretien qu’il nous accorde, il nous parle de son initiative.







Le Mutateur: Pourquoi avoir choisi de nommer votre projet Kicora et quelle est sa signification ?







Je suis de nationalité burundaise, et je fais mon projet Kicora en Tanzanie qui, comme vous le savez, est un pays anglophone. Et, ce nom veut dire : Kigoma Community College by Radio. Kigoma, parce que nous travaillons dans la région de Kigoma qui est la province ouest de la Tanzanie, à la frontière avec le Burundi. J’ai choisi ce nom, car c’est celui qui correspond le mieux aux activités que nous faisons. Kigoma College, veut dire un collège situé à Kigoma, et c’est un collège qui se développe par la radio, puisque nos activités, au finish, seront faites par ce biais.







Comment se déroule un cours ?







Pour le moment, la radio n’a pas encore commencé et nous avons voulu évoluer avec les moyens dont nous disposons. Il fallait donc partir de rien pour construire quelque chose. Mais, on avait notre intelligence, notre volonté, et des potentiels qu’il fallait mettre en éveil. Pour la bonne marche du projet, nous sommes organisés en équipe avec un Conseil d’administration de onze (11) personnes, et nous avons mis sur pied une équipe d’enseignants et de facilitateurs. C’est là que tout s’organise pour les cours. Les enseignants écrivent les manuels dans lesquels il y a le programme qui est pris en compte pour l’examen national, car notre objectif est de pouvoir donner la possibilité aux personnes adultes de passer cet examen. Et, l’objectif est qu’ils puissent plus tard obtenir les diplômes, comme tout le monde. Donc, une fois que les manuels sont élaborés, nous les remettons aux facilitateurs qui, à leur tour, vont les donner aux élèves. C’est une structure qui est basée sur une solidarité locale, et les élèves reçoivent nos livres et préparent leurs cours. Et, chaque soir, il y a une rencontre physique entre eux et le facilitateur ; celui-ci a pour rôle de faciliter l’apprentissage des élèves chez eux et dans leurs familles respectives. Et, c’est le cas dans plusieurs autres familles. Une fois le programme achevé, chaque semaine, il y a des évaluations pour contrôler le suivi des cours par les élèves et leur évolution, ce qui est normal dans tout système d’enseignement. Dès que cette phase est terminée et qu’ils finissent tout le cursus, ils vont se présenter à l’examen national. En cas de réussite, ils deviennent des élèves comme tout le monde, mais sans être allés à l’école. Et, après, ils se verront officiellement décerner par l’Etat le diplôme auquel donne droit cette réussite. Comme notre radio n’a pas encore officiellement débuté ses émissions, c’est la raison pour laquelle la rencontre entre les élèves et les facilitateurs se fait quotidiennement. Mais, quand la radio commencera ses émissions, les élèves vont la suivre et elle remplacera les facilitateurs. Et, une fois par semaine, il y aura toujours cette rencontre physique qui va permettre de garder un contact entre les élèves et le facilitateur, et elle servira aussi pour suivre les apprenants ainsi que leur évolution. De même, c’est une occasion pour permettre aux élèves d’être avec les autres et d’échanger. Cela fait référence à la philosophie maïeutique développée par Socrate, qui fait que l’élève, chez lui, face à un problème, essaye de le résoudre, et la rencontre qui s’en suit avec ses camarades et le facilitateur va lui permettre de savoir si la solution qu’il a su trouver à son problème était la bonne. Nous devons donc faire cette vérification régulièrement pour voir si nos élèves évoluent correctement et s’ils sont prêts pour passer l’examen national.







L’anglais étant la langue officielle de la Tanzanie, les cours sont-ils dispensés dans la même langue ?







L’anglais est la langue officielle de la Tanzanie, mais le kiswahili est aussi l’une des autres langues parlées dans ce pays. En tant que radio communautaire, nous avons donc choisi de diffuser nos émissions dans cette langue.







Combien de personnes vous accompagnent dans ce projet et, sur quelle base, les avez-vous choisies ?







Comme je le disais, nous avons un Conseil d’administration de onze (11) personnes. Et, elles ont été choisies en tenant compte des différentes communautés qui vivent à Kigoma. C’est une région où on retrouve des chrétiens et des musulmans, et nous avons voulu en tenir compte. Après cela, nous avons dix (10) enseignants qui sont, chacun, affectés à un cours. C’est une sorte de spécialisation que nous avons voulu faire pour chacun d’eux. Ensuite, il y a vingt (20) facilitateurs et, enfin, nos élèves qui, même s’ils sont un peu particuliers, sont au nombre de trois cent (300).







Donnez-vous vous aussi des cours ?







Le rôle, que je joue ici, est celui d’un planificateur. J’oriente, car c’est moi qui ai donné l’idée. Je fais en sorte pour que nous discutions régulièrement pour prendre les décisions qu’il faut. Mais, mon niveau de kiswahili ne me permet pas de donner des cours. Il faut que je puisse atteindre un certain niveau en matière de maîtrise pour une telle chose. Les cours sont donc donnés par des Tanzaniens, mais j’ai pour ambition de pouvoir arriver à donner des cours, un jour.







Le projet d’enseignement qui porte le nom de Kicora est axé sur le niveau primaire. Envisagez-vous de proposer, à terme, un enseignement du niveau secondaire ?







Le projet Kicora, n’est pas, en fait, uniquement axé sur le primaire, car nous parlons de l’enseignement, en général. Mais, nous avons commencé par ce niveau afin de donner une base solide à nos élèves. Imaginez-vous que ce sont des gens qui n’ont jamais été à l’école, et il fallait donc que nous commencions par ce niveau-là ; dès qu’ils auront réussi à leur examen, et seront au secondaire, nous leur donnerons des cours de ce niveau. Nous faisons cela, car ce sont, pour la plupart d’entre eux, des adultes qui ont déjà une famille. Et, après leurs diplômes, ils ne peuvent pas aller à l’école secondaire, car celle-ci a certaines contraintes. Cela demande, par exemple, qu’on aille dans un internat et qu’on s’éloigne ainsi donc, pour un certain temps, de la famille ; la plupart d’entre elles ne peuvent pas le faire, car ces personnes ont aussi leurs occupations personnelles. Mais, nous voulons évoluer avec elles, au niveau secondaire et même à celui de l’université ; c’est un rêve pour le futur.







Quel bilan pouvez-vous faire de l’enseignement et des leçons de civisme dispensés à ces 300 étudiants âgés de 14 à 60 ans, et plus ?







Le bilan est très positif, car nous sommes évalués par le ministère de l’éducation de la Tanzanie et, les manuels que nous avons mis à la disposition de nos apprenants sont des résumés du programme d’enseignement autorisé par le gouvernement tanzanien. Cela permet ainsi à l’élève adulte qui n’a pas beaucoup de temps de rapidement saisir la clé de ces manuels. Nos élèves ont donc les mêmes cours que ceux qui suivent un cursus normal. En plus, ils ont un avantage : avec nous, l’élève suit deux programmes au cours de l’année scolaire. Dans un cursus normal, l’élève suit les cours pendant neuf (09) mois et, c’est après cela qu’il passe en année supérieure. Chez nous, il suit les cours en seize (16) semaines, ce qui fait quatre mois. Sur une année de neuf (09) mois, il suit donc les cours pour deux années d’enseignement. Par exemple, un élève qui est en 3è année avec nous, fait la 3è année et la 4è année. Nos apprenants évoluent donc beaucoup plus rapidement que ceux qui vont au cours normalement. Et, cela est d’autant justifié car l’élève adulte n’a pas de temps, et il s’est inscrit car il a besoin d’apprendre pour pratiquer directement. C’est la différence entre lui et les autres.







Parlons de la radio communautaire qui doit proposer des cours à une plus grande échelle….







Mon rêve est que la radio commence ses émissions à l’instant où nous sommes. Je suis sur ce projet depuis dix (10) ans, à une époque où j’étais encore étudiant en Belgique et que je voulais faire quelque chose pour l’Afrique. Nous avons donc commencé petit et, pour la radio, tout est presqu’au point. Il nous reste à construire un pylône. Dés que j’aurai les fonds nécessaires pour construire le pylône, la radio commencera à émettre. Je suis donc en train de contacter les personnes susceptibles de m’apporter cette aide financière. Donc, c’est aussi une question de mois ou d’années. Mais, en attendant cela, nous nous battons pour travailler avec les moyens dont nous disposons.







Qui animera les émissions de la radio quand elle commencera à émettre ?







Quand cela sera effectif, nous ferons appel à des journalistes professionnels qui se chargeront de ce travail au sein de la radio. Et, comme nous sommes une radio communautaire, ces journalistes vont, au fil du temps, donner des formations, en termes de d’animation et de conception de programmes. Comme cela, ce sont les populations qui animeront la radio, avec ces journalistes, à l’avenir. L’objectif étant que, comme c’est une radio communautaire, les membres de la communauté soient impliqués dans la gestion de celle-ci.







A part l’alphabétisation, la radio aura-t-elle d’autres missions ?







Nous ne pouvons pas parler de l’école tout le temps, car l’adulte qui travaille dans un champ, qui a son petit commerce ou qui s’occupe d’autres choses, a besoin de son temps. Nos programmes d’enseignement seront donc diffusés dans la soirée, quand les adultes qui suivent ces cours seront chez eux en famille. Dans la journée, nous aurons un programme qui ressemblera à celui des autres radios. Nous donnerons des informations, nous diffuserons des entretiens que nous aurons eus avec des personnes, nous parlerons des problèmes économiques, nous allons sensibiliser sur la Sida ; ce sera un espace qui permettra à la communauté de parler des choses négatives, mais aussi positives qu’elle vit. Si le président vient en visite dans notre région, nous en parlerons, si une équipe sportive de Kigoma fait une bonne performance, nous allons en parler.







Dans quelle langue ces programmes seront-ils diffusés ?







Ils le seront en kiswahili mais, lors des entretiens avec des personnalités ne parlant pas cette langue, il y aura une traduction pour permettre à la population de connaître l’information qui est diffusée. Notre objectif est de contribuer, par le biais de cet outil de communication qu’est la radio, au développement de la région. Et, pour cela, il faut qu’on y parle une langue de la région.







Pendant combien d’heures la radio va-t-elle émettre ?







Ce n’est pas encore décidé. Mais, ce choix se fera avec nos élèves, le Conseil d’administration et toutes les personnes qui sont impliquées dans ce projet, et en tenant compte des attentes de la communauté. Nous demanderons l’avis des journalistes qui animeront, au début, la radio. Et, puisque la production et la diffusion de chaque émission sur la radio coûteront de l’argent, il faut que nous en tenions compte et, surtout, parce que nous n’avons pas encore les fonds nécessaires pour que le projet de la radio entre dans sa phase concrète. La priorité sera donnée à nos programmes scolaires et, au fil de notre évolution, nous ferons les choix qu’il faut.







Vous êtes l’un des lauréats, pour l’année 2008, du Concours Harubuntu. Qu’est-ce que cela vous a apporté ?







En Afrique, les projets sont souvent conçus et bien ficelés. Et, pour ces projets, on connaît déjà le budget, le nombre de personnes qui vont y travailler, et avec une durée du projet de 3 ou 5 ans, généralement. C’est le modèle traditionnel. Nous avons commencé à une date précise, mais c’est un projet pour la vie. Quand nous l’avons commencé, beaucoup de personnes se sont posé des questions et s’interrogeaient sur nos objectifs. Mais, avec le Prix, les choses ont changé, et les gens ont commencé à nous prendre beaucoup plus au sérieux, et estiment, présentement, que c’est un projet de valeur qui peut entrer en compétition avec beaucoup d’autres. Maintenant, ce n’est donc plus un projet tanzanien, mais il a une dimension africaine, voire internationale. La région de Kigoma est éloignée de la capitale et, grâce à ce Prix, nous avons une visibilité certaine. C’est ainsi que le ministère nous prend beaucoup plus au sérieux et, cela a élargi le champ de nos interactions. Ce Prix permet de prendre beaucoup plus de contacts et, c’est en fait une clé qui nous a ouvert d’autres portes. Et, dans le cadre de Kicora, je rencontre des gens à qui je fournis des informations sur ma distinction, ils peuvent aller vérifier l’information ainsi fournie ; ce Prix va dans le même but que je me suis fixé, qui est celui d’un éveil des consciences et des potentiels locaux, c'est-à-dire ceux qui donnent de l’espoir. Cela nous a donné plus de force, et de crédibilité. Et, avec cela, les inscriptions augmentent de jour en jour. En fait, notre projet était une bougie à laquelle Echos Communication est venue donner plus d’éclat en 2008.










Avez-vous un dernier mot, pour conclure notre entretien ?







Mon premier souhait est qu’on encourage davantage le potentiel qui existe en Afrique, car nous les Africains, nous pensons que nous ne sommes pas capables de faire des projets de valeur. Nous avons besoin de nous estimer plus souvent. J’ai été au Sénégal, et j’ai vu les choses qui s’y font et, c’est formidable. Mon rêve est que chacun de nous prenne le taureau par les cornes, et réalisent des choses. Mon second souhait est qu’on voit l’Afrique comme un continent qui bouge et qui est capable de nouer des partenariats avec les autres et, ce, dans le sens de faire évoluer le bien-être en Afrique. Et, pour finir, il faut encourager l’éducation. Il y a beaucoup de personnes non instruites sur le continent, et il faut leur donner la chance de pouvoir accéder à l’éducation. Il faut donner sa chance à la solidarité afin que le potentiel qui existe en Afrique se mette au travail pour la création de la richesse. On en a beaucoup, mais le regard est souvent braqué sur le sous-sol mais, la richesse, elle est mentale, car l’Africain est quelqu’un qui pense beaucoup et sait orienter son sujet. Il faut juste de l’audace pour aller plus loin.







Propos recueillis par Bernado Houènoussi, en direct d’Africités 5 à Marrakech.